Décision n° 03/D.C.C/CCC/ du 12 Chaoual 1444 correspondant au 2 mai 2023 relative au contrôle de conformité de l’article 4 de la loi organique relative à l’information, à la Constitution.
La Cour constitutionnelle, Sur saisine parlementaire par quarante-huit (48) députés de l’Assemblée Populaire Nationale, par lettre datée du 13 avril 2023, déposée par M. Abdelouahab Yakoubi, délégué des auteurs de la saisine le 13 avril 2023 et enregistrée au greffe de la Cour constitutionnelle en date du 16 avril 2023 sous le numéro 19/23, aux fins de contrôler la conformité de l’article 4 de la loi organique relative à l’information, à la Constitution ;
Vu la Constitution, notamment en ses articles 116-5°, 148 (alinéa 2), 185, 193 (alinéa 2), 194, 196, 197 (alinéa 2) et 198 (alinéa 5) ;
Vu la loi organique n° 22-19 du 26 Dhou El Hidja 1443 correspondant au 25 juillet 2022 fixant les procédures et modalités de saisine et de renvoi devant la Cour constitutionnelle ;
Vu le règlement du 9 Safar 1444 correspondant au 5 septembre 2022 fixant les règles de fonctionnement de la Cour constitutionnelle ;
Vu le règlement intérieur de la Cour constitutionnelle du 10 Safar 1444 correspondant au 6 septembre 2022 ;
Après avoir entendu les deux membres rapporteurs ;
Après délibération ;
En la forme :
Attendu que la loi organique relative à l’information, objet de saisine, dont le projet a été déposé par le Premier ministre et présenté en Conseil des ministres, après avis du Conseil d’Etat, puis déposé au bureau de l’Assemblée Populaire Nationale, conformément aux articles 143 et 144 (alinéa 2) de la Constitution ;
Attendu que le contenu ainsi que le thème de la saisine portent, essentiellement, sur l’article 4 de la loi organique relative à l’information, ainsi rédigé :
« Les activités d’information sont exercées par les médias relevant :
— des institutions publiques et entreprises du secteur public ;
— des partis politiques, associations et syndicats dans les limites fixées par les lois qui les régissent ;
— des personnes physiques de nationalité algérienne, exclusivement, et des personnes morales de droit algérien dont le capital est détenu par des personnes physiques de nationalité algérienne, exclusivement, ou des personnes morales de droit algérien, dont les actionnaires ou les associés sont, exclusivement, de nationalité algérienne.
Les actions citées au présent tiret sont nominatives ».
Attendu que les auteurs de la saisine contestent l’article 4 susmentionné, du fait qu’il prive les compétences algériennes binationales du droit de créer, de posséder ou de contribuer au capital des entreprises médiatiques algériennes, tel qu’il ressort dans la lettre de saisine, ce qui est en contradiction avec les dispositions des articles 35, 37 et 67 de la Constitution ;
Attendu que la saisine de la Cour constitutionnelle par les parlementaires est intervenue en application des articles 116-5° et 193 (alinéa 2) de la Constitution, et bien qu’il s’agit d’une procédure admise qui a pour objet la participation active des parlementaires dans la vie politique. Toutefois, la Cour constitutionnelle rappelle à nouveau que la pratique de ce droit est soumise à un ensemble de procédures prévues par la Constitution ;
Attendu que l’article 140 de la Constitution a clairement précisé les procédures relatives aux lois organiques et prévu la majorité absolue des députés et des membres du Conseil de la Nation afin que le Président de la République puisse saisir, obligatoirement, la Cour constitutionnelle, en application de l’article 190 (alinéa 5) de la Constitution ;
Attendu qu’il est établi que le processus législatif relatif à la loi organique, objet de saisine, n’est pas encore achevé conformément aux exigences constitutionnelles ;
Attendu qu’en prévoyant à l’opposition parlementaire et aux quarante (40) députés ou vingt-cinq (25) membres du Conseil de la Nation le droit de saisir la Cour constitutionnelle, en vertu des articles 116-5° et 193 (alinéa 2) de la Constitution, le constituant vise à leur permettre d’intervenir dans le cadre du contrôle constitutionnel ;
Attendu que le constituant a prévu la soumission des lois organiques au contrôle de conformité obligatoirement par la Cour constitutionnelle ;
Attendu qu’il appartient au Président de la République, seul, de saisir, obligatoirement, la Cour constitutionnelle au sujet des lois organiques, conformément à l’article 190 (alinéa 5) de la Constitution, par conséquent, toute autre instance n’est habilitée pour ce faire ;
Attendu que la présente saisine est intervenue contrairement aux dispositions de l’article 190 (alinéa 5) de la Constitution susmentionné, qu’il y a lieu de la refuser.
Par ces motifs
Décide ce qui suit :
Premièrement : La saisine est irrecevable en la forme.
Deuxièmement : La présente décision sera notifiée au Président de la République, au Président du Conseil de la Nation, au Président de l’Assemblée Populaire Nationale, au Premier ministre et au délégué des auteurs de la saisine.
Troisièmement : La présente décision sera publiée au Journal officiel de la République algérienne démocratique et populaire.
Ainsi en a-t-il été délibéré par la Cour constitutionnelle en ses séances du 10 et 12 Chaoual 1444 correspondant au 30 avril et 2 mai 2023.
Le Président de la Cour constitutionnelle
Omar BELHADJ
Leïla ASLAOUI, membre ;
Bahri SAADALLAH, membre ;
Mosbah MENAS, membre ;
Djilali MILOUDI, membre ;
Ameldine BOULANOUAR, membre ;
Abdelouahab KHERIEF, membre ;
Abbas AMMAR, membre ;
Abdelhafid OSSOUKINE, membre ;
Ammar BOUDIAF, membre ;
Mohamed BOUTERFAS, membre.