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Avis 2024

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Avis n° 01/A.C.C/ I.C/24 du 4 Rajab 1445 correspondant au 16 janvier 2024 relatif à l’interprétation de l’expression énoncée à l’article 195 (alinéa 1er) et à l’article 141 de la Constitution.

La Cour constitutionnelle,

Sur saisine de la Cour constitutionnelle par quarante-six (46) députés de l’Assemblée Populaire Nationale, en vertu d’une lettre datée du 3 janvier 2024, déposée par le député Messaoud Zerfaoui, en sa qualité de délégué des auteurs de la saisine, enregistrée au secrétariat général, service du greffe de la Cour constitutionnelle, le 3 janvier 2024, sous le n° 01/2024 à laquelle est jointe la liste des noms, prénoms, signatures et copies de la carte de député, auteurs de la saisine, et ce, en vertu de l’interprétation de la formule « disposition réglementaire » contenue dans les articles 195 et 141 de la Constitution ;

Vu la Constitution, notamment en ses articles 91 tirets (6° et 7°), 116 (tiret 5°), 141, 185, 190 (alinéa 3), 192 (alinéa 2), 193 (alinéa 2), 195 et 196 ;

Vu la loi organique n° 22-19 du 26 Dhou El Hidja 1443 correspondant au 25 juillet 2022 fixant les     procédures et modalités de saisine et de renvoi devant la Cour constitutionnelle ;

Vu le règlement du 9 Safar 1444 correspondant au 5 septembre 2022 fixant les règles de    fonctionnement de la Cour constitutionnelle ;

Vu le règlement intérieur de la Cour constitutionnelle du 10 Safar 1444 correspondant au 6 septembre 2022 ;

Les deux membres rapporteurs entendus ;

Après en avoir délibéré ;

En la forme :

— Attendu que la saisine de la Cour constitutionnelle en vue de l’interprétation de deux dispositions constitutionnelles, introduite par quarante-six (46) députés de l’Assemblée Populaire Nationale, en vertu d’une lettre déposée par le délégué des auteurs de la saisine au niveau du greffe de la Cour constitutionnelle, accompagnée de la liste comportant les noms, prénoms et copies de la carte de député des quarante-six (46) députés, auteurs de la saisine, ainsi que d’une copie de la Constitution, est conforme aux articles 192 (alinéa 2) et 193 (alinéa 2) de la Constitution.

Au fond :

— Attendu que l’article 195 (alinéa 1er) de la Constitution, objet de saisine, prévoit que « la Cour constitutionnelle peut être saisie d’une exception d’inconstitutionnalité sur renvoi de la Cour suprême ou du Conseil d’Etat, lorsque l’une des parties au procès soutient devant une juridiction que la disposition législative ou réglementaire, dont dépend l’issue du litige, porte atteinte à ses droits et libertés tels que garantis par la Constitution. » ;

— Attendu que si la formule « disposition législative » ne soulève aucune difficulté quant à sa finalité et à sa signification, selon le contenu de la lettre de saisine, néanmoins, la formule « disposition réglementaire » soulève, au contraire, un questionnement sur la signification de « réglementation » au sens de l’article 141 de la Constitution soutenu qui stipule que « les matières autres que celles réservées à la loi, relèvent du pouvoir réglementaire du Président de la République. L’application des lois relève du domaine réglementaire du Premier ministre ou du Chef du Gouvernement, selon le cas. » ;

— Attendu que les auteurs de la saisine affirment que le fait d’accorder, par le constituant, en vertu de la Constitution de 2020, à l’une des parties au procès, l’exception d’inconstitutionnalité d’une disposition réglementaire ou législative qui viole ses droits et libertés garantis par la Constitution, selon des procédures et des conditions fixées par la loi, est en soi un acquis majeur apporté par l’amendement constitutionnel ;

— Attendu qu’il ressort des dispositions de l’article 141 de la Constitution que les dispositions réglementaires sont celles émanant du Président de la République, du Premier ministre ou du Chef du Gouvernement, selon le cas. Ceci soulève des questionnements selon les auteurs de la saisine se rapportant au renvoi de certaines lois à des arrêtés interministériels en vue de déterminer les modalités d’application de certaines de leurs dispositions. Toutefois ceci ne relève pas du pouvoir réglementaire du Président de la République, ni du Premier ministre et ni du Chef du Gouvernement, selon le cas. A titre d’exemple, l’article 226 du code des douanes est suivi de la promulgation de certains textes sans en définir leur nature juridique (circulaire, instruction, note) et aussi sans aucun renvoi d’un texte législatif, ainsi que la correspondance n° 10 du 16 janvier 2019 émanant du directeur général de la fonction publique et de la réforme administrative adressée aux chefs d’inspection de la fonction publique relative aux modalités d’application de certaines procédures contenant le régime disciplinaire applicable à l’encontre des fonctionnaires faisant l’objet de poursuites disciplinaires ou pénales, conformément aux dispositions des articles 173 et 174 de l’ordonnance n° 06-03 du 15 juillet 2006, complétée, relative au statut général de la fonction publique, sans aucun renvoi de ces articles. Cette état de fait pourrait amener à la création de différents statuts juridiques et à se poser des questions sur leur vraie nature juridique et aussi si leur contenu relève des dispositions réglementaires ;

— Attendu que selon la lettre de la saisine, certains décrets exécutifs renvoient aux règlements et aux arrêtés tels que le décret exécutif n° 22-208 du 5 juin 2022 fixant le régime des études et de la formation en vue de l’obtention des diplômes de l’enseignement supérieur qui prévoit dans son article 1er qu’il a été promulgué conformément aux dispositions des articles 16, 17 et 18 de la loi n° 99-05 du 4 avril 1999, modifiée et complétée, portant loi d’orientation sur l’enseignement supérieur, ce qui est conforme à l’article 141 (alinéa 2) de la Constitution, toutefois, il renvoie à un arrêté (article 5) et au règlement (article 17), dès lors, il y a lieu selon les auteurs de la saisine de s’interroger sur la nature juridique de ces arrêtés et sur leur caractère réglementaire ou pas ;

— Attendu que la disposition réglementaire soulève plusieurs interrogations et en vue de cerner avec précision sa définition, tant pour le juge que pour le justiciable, les auteurs de la saisine sollicitent la Cour suprême aux fins d’interpréter la disposition constitutionnelle contenue dans les articles 141 et 195 (alinéa 1er) de la Constitution ;

— Attendu que l’article 190 (alinéa 3) de la Constitution a conféré aux instances de saisine la possibilité de saisir la Cour constitutionnelle sur la constitutionnalité des règlements dans un délai d’un mois, à partir de la date de leur publication ;

— Attendu qu’il ressort des articles 190 (alinéa 3) et 195 (alinéa 1er) de la Constitution susmentionnés, que le constituant a utilisé les termes « règlements » et « disposition réglementaire » qui représentent des règles juridiques générales et abstraites, émanant du pouvoir exécutif et soumises au contrôle de la Cour constitutionnelle sans, toutefois, en préciser la nature, et qu’il y a lieu de savoir si ces concepts juridiques visent les règlements et les dispositions réglementaires indépendants ou exécutifs, ou les deux à la fois ;

— Attendu que la Cour constitutionnelle rappelle que le but recherché à travers l’interprétation de la Constitution consiste à définir la signification précise de ses dispositions et à éliminer toute  ambiguïté, en vue d’une application saine et exacte, et ce, en ayant recours aux différents modes d’interprétation, soit en définissant la signification des termes utilisés, soit en tenant compte de l’intention du constituant du contexte dans lequel ils ont été formulés ou interprétés tout en tenant compte des dispositions ayant un lien avec le texte ou la disposition faisant l’objet d’interprétation, tel que c’est le cas de la présente saisine qui tend à interpréter le sens de la disposition réglementaire contenue dans l’article 195 de la Constitution, lequel vise en réalité le terme « réglementation » cités dans l’article 190 (alinéa 3) de la Constitution ;

— Attendu que la Cour constitutionnelle a établi un principe général à l’occasion de l’interprétation de la l’article 127 de la Constitution en vertu de son avis n° 01/A.C.C/I.C/23 du 20 Moharram1445 correspondant au 7 août 2023 indiquant que « Attendu que l’interprétation d’une disposition constitutionnelle ne peut se faire indépendamment de celles déterminées par d’autres dispositions de la Constitution ayant un lien avec la disposition, objet de l’interprétation, et ce, eu égard au rang et à la primauté de la Constitution, formant un seul et unique dispositif indivisible. Cela étant, il est impératif d’établir un lien entre les dispositions constitutionnelles afin de lever toute ambiguïté et équivoque entachant le corps du texte, établir l’exacte signification et teneur, faciliter une meilleure compréhension et enfin assurer une application uniforme. » ;

— Attendu que la Constitution a conféré au Parlement le pouvoir de légiférer, dans des domaines définis, à titre limitatif, par des lois organiques soumises au contrôle de la Cour constitutionnelle, un contrôle de conformité préalable et obligatoire, et le pouvoir de légiférer par des lois ordinaires en laissant les autres domaines qui ne relèvent pas de la loi et qui nécessitent une réglementation indépendante, en vertu des règles juridiques, à la compétence du Président de la République dans le cadre de l’exercice de son pouvoir réglementaire qui, à leur tour, sont soumises au contrôle  constitutionnel un (1) mois après leur publication ;

— Attendu que les règlements ou dispositions réglementaires prennent deux formes : des règlements autonomes, dont l’exercice relève exclusivement de la compétence du Président de la République dans les domaines qui ne relèvent pas de la loi, et qui sont promulgués sous forme de décrets présidentiels et de règlements exécutifs dont l’exercice appartient au Premier ministre ou au Chef du Gouvernement, selon le cas, afin d’appliquer les lois et règlements indépendants, soit des décrets exécutifs. Ceci soulève l’interrogation quant à l’opportunité de soumettre ces derniers au contrôle de la Cour constitutionnelle, et exige en même temps de définir exactement les termes « réglementation » et « disposition réglementaire » contenus dans les articles 190 (alinéa 3) et 195 (alinéa 1er) ;

— Attendu qu’en instituant le contrôle constitutionnel et en soumettant les lois et règlements rendus par le Président de la République au contrôle de la Cour constitutionnelle dans le cadre du contrôle de conformité, du contrôle constitutionnel ou de l’exception d’inconstitutionnalité, le constituant vise à faire prévaloir la primauté de la Constitution sur les autres règles juridiques et par conséquent à préserver la sécurité juridique, vu qu’ils représentent les signes de l’Etat de droit ;

— Attendu que le règlement d’exécution exercé par le Premier ministre ou le Chef du  Gouvernement, selon le cas, a pour objet l’application des lois et règlements indépendants, qu’il existe ainsi une interdépendance entre loi et règlement, ce dernier tirant son fondement de celle-ci ;

— Attendu que la législation en vigueur au sein du système judiciaire ainsi que pour le contentieux administratif reconnaît aux juridictions relevant du système judiciaire d’ordre administratif la compétence légale de statuer sur les recours en annulation, en interprétation, ou en appréciation de la légalité des décisions administratives émanant des autorités administratives centrales, des institutions publiques nationales et des organisations professionnelles. Qu’en conséquence, les droits et libertés du citoyen consacrés par la Constitution, sont en réalité garantis en vertu d’un ensemble de législations telles que :

* la loi organique n° 22-10 du 9 Dhou El Kaâda 1443 correspondant au 9 juin 2022 relative à l’organisation judiciaire, notamment les dispositions contenues dans son titre 4 ;

* la loi organique n° 22-11 du 9 Dhou El Kaâda 1443 correspondant au 9 juin 2022 modifiant et complétant la loi organique n° 98-01 du 4 Safar 1419 correspondant au 30 mai 1998 relative à l’organisation, au fonctionnement et aux attributions du Conseil d’Etat, notamment en ses articles 9, 10 et 11 ;

* la loi n° 22-13 du 13 Dhou El Hidja 1443 correspondant au 12 juillet 2022 modifiant et complétant la loi n° 08-09 du 18 Safar 1429 correspondant au 25 février 2008 portant code de procédure civile et administrative, notamment en ses articles 900 bis, 900 bis 1, 900 bis 2 et 900 bis 3 ;

Par conséquent, au vu des dispositions des articles 141, 190 (alinéa 3) et 195 (alinéa 1er) de la Constitution et eu égard aux motifs cités ci-dessus ;

La Cour constitutionnelle émet l’avis suivant :

En la forme :

La saisine de la Cour constitutionnelle par quarante-six (46) députés de l’Assemblée Populaire Nationale relative à l’interprétation des dispositions constitutionnelles est intervenue conformément aux dispositions des articles 192 (alinéa 2) et 193 (alinéa 2) de la Constitution.

En conséquence de quoi la saisine est recevable en la forme.

Au fond :

Premièrement : Le terme « règlements » contenu dans l’article 190 (alinéa 3) et celui de « disposition réglementaire » énoncé à l’article 195 (alinéa 1er) de la Constitution, visent les textes réglementaires  indépendants rendus par le Président de la République dans le cadre de l’exercice de son pouvoir réglementaire dans les matières autres que celles réservées à la loi, conformément aux dispositions de l’article 141 (alinéa 1er) de la Constitution, qui sont, exclusivement, soumis au contrôle   constitutionnel et à l’exception d’inconstitutionnalité, ainsi qu’au contrôle de légalité qu’exerce la justice administrative dans d’autres cas. Les dispositions réglementaires exécutives qui relèvent de la compétence du Premier ministre ou du Chef du Gouvernement, selon le cas, sont soumises au   contrôle de la justice administrative.

Deuxièmement : Le présent avis sera notifié au Président de la République, au Président du Conseil de la Nation, au Président de l’Assemblée Populaire Nationale, au Premier ministre et au délégué des auteurs de la saisine.

Troisièmement : Le présent avis sera publié au Journal officiel de la République algérienne démocratique et populaire.

Ainsi en a-t-il été délibéré par la Cour constitutionnelle en sa séance tenue le 4 Rajab 1445 correspondant au 16 janvier 2024.

Le président de la Cour constitutionnelle

Omar BELHADJ

Leïla ASLAOUI, membre ;

Mosbah MENAS, membre ;

Ameldine BOULANOUAR, membre ;

Fatiha BENABBOU, membre ;

Abbas AMMAR, membre ;

Abdelhafid OSSOUKINE, membre ;

Ammar BOUDIAF, membre ;

Mohammed BOUTERFAS, membre.

Avis n° 02 /A.C.C/I.C/24 du 4 Moharram 1446 correspondant au 10 juillet 2024 relatif à l’interprétation de la disposition contenue dans l’article 187 (alinéa 1er – tiret 2) de la Constitution.

La Cour constitutionnelle,

Sur saisine de la Cour constitutionnelle par un groupe de députés de l’Assemblée Populaire Nationale, conformément aux dispositions des articles 192 (alinéa 2) et 193 (alinéa 2) de la Constitution, par lettre datée du 29 juin 2024, enregistrée au greffe de la Cour constitutionnelle, en date du 30 juin 2024, sous le numéro 02/2024, visant à interpréter l’article 187 (alinéa 1er – tiret 2) de la Constitution ;

Vu la Constitution, notamment en ses articles 116-5°, 185, 192 (alinéa 2), 193 (alinéa 2), 194, 196 et 197 (alinéa 1er) ;

Vu la loi organique n° 22-19 du 26 Dhou El Hidja 1443 correspondant au 25 juillet 2022 fixant les procédures et modalités de saisine et de renvoi devant la Cour constitutionnelle, notamment son article 13 ;

Vu l’ordonnance n° 06-03 du 19 Joumada Ethania 1427 correspondant au 15 juillet 2006, complétée, portant statut général de la fonction publique ;

Vu la loi n° 99-05 du 18 Dhou El Hidja 1419 correspondant au 4 avril 1999, modifiée et complétée, portant loi d’orientation sur l’enseignement supérieur ;

Vu le décret présidentiel n° 21-304 du 25 Dhou El Hidja 1442 correspondant au 4 août 2021 fixant les conditions et les modalités d’élection des professeurs de droit constitutionnel, membres de la Cour constitutionnelle ;

Vu le décret exécutif n° 08-130 du 27 Rabie Ethani 1429 correspondant au 3 mai 2008, modifié et complété, portant statut particulier de l’enseignant chercheur ;

Vu le règlement du 9 Safar 1444 correspondant au 5 septembre 2022 fixant les règles de fonctionnement de la Cour constitutionnelle, notamment ses articles 15 et 17 ;

Vu le règlement intérieur de la Cour constitutionnelle du 10 Safar 1444 correspondant au 6 septembre 2022, notamment ses articles 29, 31, 32, 33, 34, 35 et 36 ;

Les membres rapporteurs entendus,

 Après en avoir délibéré,

 En la forme : 

Attendu que la saisine déposée par un groupe de députés de l’Assemblée Populaire Nationale, dont le nombre est de quarante-cinq (45), aux fins d’interpréter une disposition constitutionnelle, satisfait aux conditions de forme.

Au fond :

 Attendu que les auteurs de la saisine considèrent que l’application dudit article a donné lieu à « des divergences d’interprétation », entre ceux qui exigent vingt (20) ans d’expérience, à compter de la première année d’emploi permanent dans un établissement d’enseignement supérieur, écartant ainsi les années de travail dans le cadre des contrats applicables dans le secteur de l’enseignement supérieur, qui sont des contrats à durée déterminée d’une année renouvelable ne conférant pas les mêmes droits et obligations qu’un enseignant permanent. En revanche, certains estiment qu’une telle interprétation est restrictive et pourrait exclure un grand nombre d’enseignants, à chaque fois, alors que le texte fait référence à l’expérience acquise dans un établissement d’enseignement supérieur. Cette expérience inclut les périodes de travail sous-contrat au début de la carrière professionnelle pour la plupart des enseignants. En outre, ajoutent les auteurs de la saisine, les périodes de travail sous-contrat sont calculées et valorisées, par les services de la fonction publique, en tant que périodes d’expérience et sont, également, prises en compte lors des concours de recrutement pour des postes permanents, et à plus forte raison, lors de l’accomplissement du service national, qui est désormais valorisé dans le parcours professionnel du fonctionnaire par les lois récentes ;

Attendu que les auteurs de la saisine se sont interrogés sur la signification des vingt (20) ans d’expérience : son sens est-il fondé sur « les cours magistraux et le contact avec les étudiants, ou bien inclut-il aussi le statut des enseignants ayant occupé des postes administratifs et souhaitant se porter candidats et n’exerçant plus les tâches administratives ? » ; comment peuvent-ils « prouver qu’ils n’ont pas cessé d’enseigner tout au long de la période où ils assumaient des fonctions administratives ?, se demandent les auteurs de la saisine, à la lumière de l’interprétation qui considère l’expérience comme étant principalement l’enseignement, et non simplement l’appartenance au secteur de l’enseignement supérieur » ;

Attendu que l’article 192 (alinéa 2) de la Constitution prévoit que les instances, visées à l’article 193 de la Constitution, peuvent saisir la Cour constitutionnelle en vue d’interpréter une ou plusieurs dispositions constitutionnelles et d’émettre un avis, à ce propos ;

Attendu que cette disposition confère à la Cour constitutionnelle la compétence exclusive d’interpréter les dispositions constitutionnelles sans, pour autant, créer de nouvelles dispositions, son interprétation n’étant qu’un avis de nature à s’incorporer au texte, objet de l’interprétation, qui devient ainsi son prolongement, dans le sens que la Cour constitutionnelle a entendu donner ;

Attendu que la Cour constitutionnelle a déjà adopté une méthode d’interprétation des dispositions constitutionnelles afin de lever toute ambiguïté quant au texte et en dégager l’exacte signification, pour une meilleure compréhension de son contenu et de son objectif, pour assurer une application uniforme. Elle a, également, affirmé que le principe est de ne pas dévier l’interprétation des dispositions des objectifs et des intentions pour lesquels elles ont été édictées, et de ne pas les lire en dehors de leur sens véritable et de leur contexte, en vue d’éviter les différentes interprétations qui pourraient les éloigner de l’objectif visé, dès lors que les dispositions constitutionnelles sont rédigées pour atteindre un but fixé par le constituant ;

Attendu que la Cour constitutionnelle souligne que sa méthode d’interprétation se fait principalement dans le cadre des limites des dispositions énoncées dans la Constitution, conformément aux exigences de l’article 192 (alinéa 2), ce qui implique que sa compétence dans ce domaine se limite à l’interprétation d’une ou de plusieurs dispositions constitutionnelles, sans empiéter sur la compétence d’autres institutions constitutionnelles, en matière d’interprétation des dispositions législatives et réglementaires ;

Attendu que la Cour constitutionnelle, de par sa méthode d’interprétation instaurée dans son avis n° 01/23 du 20 Moharram 1445 correspondant au 7 août 2023, ainsi que dans son avis n° 01/24 du 4 Rajab 1445 correspondant au 15 janvier 2024, a souligné que « l’interprétation d’une disposition contenue dans la Constitution ne peut se faire indépendamment des dispositions déterminées par d’autres dispositions de la Constitution qui ont un lien avec la disposition objet de l’interprétation, et ce, eu égard au rang et à la primauté de la Constitution, formant un seul et unique dispositif  indivisible. Cela étant, il est impératif d’établir un lien entre les dispositions constitutionnelles afin de dissiper toute ambiguïté et équivoque entachant le corps du texte, de déterminer l’exacte signification et teneur, de faciliter une meilleure compréhension et enfin d’assurer une application uniforme » ;

Attendu que, si la présente saisine porte sur l’article 187 (alinéa 1er – tiret 2) de la Constitution, quant à la signification de « jouir d’une expérience d’au moins, vingt (20) ans en droit », l’interprétation de ladite disposition est liée principalement à une disposition constitutionnelle antérieure, en l’occurrence l’article 186 (alinéa 1er – tiret 3) de la Constitution, qui dispose ce qui suit : « Six (6) élus au suffrage parmi les professeurs de droit constitutionnel. Le Présient d e la République détermine les conditions et les modalités d’élection de ces membres » ;

Attendu que la méthode adoptée par la Cour constitutionnelle, dans l’exercice de sa compétence interprétative, lui impose de se conformer stricto sensu aux dispositions constitutionnelles et de procéder à l’interprétation dans son cadre et ses limites, en tenant compte de son contenu. Toutefois, la spécificité de l’objet de saisine oblige la Cour constitutionnelle à se référer à la réglementation émanant du Président de la République, en application d’un renvoi constitutionnel explicite sur l’objet, afin de lever toute ambiguïté quant aux dispositions constitutionnelles et de pouvoir statuer sur l’objet de saisine, sans enfreindre les dispositions prévues par la Constitution ;

Attendu que l’article 10 du décret présidentiel objet de renvoi, cité dans les visas de l’avis de la Cour constitutionnelle, prévoit que tout candidat à l’élection de la Cour constitutionnelle, pour la catégorie des professeurs de droit constitutionnel, doit joindre à son dossier une attestation de fonction récente justifiant une expérience d’au moins, vingt (20) ans de service effectif en matière de droit dans les établissements de l’enseignement supérieur ;

Sur ce, l’expression « jouir d’une expérience d’au moins vingt 20 ans en droit… », contenue dans l’article 187 (alinéa 1er – tiret 2) de la Constitution, signifie : la période pendant laquelle un professeur de droit a accumulé une expérience avérée au titre de l’attestation prévue à l’article 10 du décret susmentionné. Cette période ne peut inclure que les années d’enseignement effectif, conformément à la législation et à la réglementation en vigueur ;

Attendu que l’assomption des responsabilités administratives au niveau des établissements d’enseignement supérieur ne dispense guère les personnes concernées de leurs tâches d’enseignement, dès lors que le volume horaire peut être aménagé pour concilier gestion administrative et enseignement ;

Attendu que si l’assomption des fonctions administratives est de nature à porter atteinte au principe d’égalité entre les candidats à la Cour constitutionnelle, le candidat devrait cesser d’exercer ses fonctions administratives dès l’acceptation de son dossier de candidature ;

Par conséquent,

 La Cour constitutionnelle émet l’avis suivant :

 Premièrement : En la Forme :

 La saisine est recevable.

Deuxièmement : Au fond :

 L’expression « jouir d’une expérience d’au moins vingt 20 ans en droit… » contenue dans l’article 187 (alinéa 1er – tiret 2) de la Constitution signifie : la période pendant laquelle un professeur de droit a accumulé une expérience avérée en vertu de l’attestation prévue à l’article 10 du décret susmentionné. Cette période ne peut inclure que les années d’enseignement effectif, conformément à la législation et à la réglementation en vigueur.

Troisièmement : Le présent avis sera notifié au Président de la République, au Président du Conseil de la Nation, au Président de l’Assemblée Populaire Nationale, au Premier ministre et au délégué des auteurs de la saisine.

Quatrièmement : Le présent avis sera publié au Journal officiel de la République algérienne démocratique et populaire.

Ainsi en a-t-il été délibéré par la Cour constitutionnelle en sa séance tenue le 4 Moharram 1446 correspondant au 10 juillet 2024.

Le Président de la Cour constitutionnelle

Omar BELHADJ

 

 

— Leïla ASLAOUI, membre ;

— Bahri SAADALLAH, membre ;

— Mosbah MENAS, membre ;

— Naceurdine SABER ; membre ;

— Ameldine BOULANOUAR, membre ;

— Fatiha BENABBOU, membre ;

— Abdelouahab KHERIEF, membre ;

— Abbas AMMAR, membre ;

— Abdelhafid OSSOUKINE, membre ;

— Ammar BOUDIAF, membre ;

— Mohamed BOUTERFAS, membre.

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