République Algérienne
Démocratique et Populaire
Cour constitutionnelle
الجمهورية الجزائرية
الديمقراطية الشعبية
المحكمة الدستورية

Décisions : 2025

image_print

Décision n° 01/D.CC/25 du 30 Rajab 1446 correspondant au 30 janvier 2025 relative à la déclaration de la vacance de siège et au remplacement d’un député à l’Assemblée Populaire Nationale.

La Cour Constitutionnelle,

Vu la Constitution, notamment en ses articles 114, 132 et 193 ;

Vu la loi organique n° 16-12 du 22 Dhou El Kaâda 1437 correspondant au 25 août 2016, modifiée et complétée, fixant l’organisation et le fonctionnement de l’Assemblée Populaire Nationale et du Conseil de la Nation ainsi que les relations fonctionnelles entre les Chambres du Parlement et le Gouvernement ;

Vu l’ordonnance n° 21-01 du 26 Rajab 1442 correspondant au 10 mars 2021, modifiée et complétée, portant loi organique relative au régime électoral, notamment ses articles 215 et 216 ;

Vu le décret présidentiel n° 21-96 du 27 Rajab 1442 correspondant au 11 mars 2021 portant convocation du corps électoral pour l’élection des membres de l’Assemblée Populaire Nationale ;

Vu la proclamation du Conseil constitutionnel n° 01/P.C.C/21 du 12 Dhou El Kaâda 1442 correspondant au 23 juin 2021 portant résultats définitifs de l’élection des membres de l’Assemblée Populaire Nationale qui a eu lieu le Aouel Dhou El Kaâda 1442 correspondant au 12 juin 2021 ;

Vu le règlement du 9 Safar 1444 correspondant au 5 septembre 2022 fixant les règles de fonctionnement de la Cour constitutionnelle, notamment ses articles 77 et 78 ;

Vu le règlement intérieur de la Cour constitutionnelle du 10 Safar 1444 correspondant au 6 septembre 2022 ;

Après avoir pris connaissance de l’extrait du procès verbal de la réunion du bureau de l’Assemblée Populaire Nationale tenue le lundi 20 janvier 2025 portant déclaration de la vacance du siège du député Khalidj Omar, élu sur la liste du parti du Rassemblement National Démocratique, circonscription électorale de « Tlemcen », par suite de décès ;

Vu la correspondance du Président de l’Assemblée Populaire Nationale n° 50/25 datée du 21 janvier 2025 et enregistrée au greffe de la Cour constitutionnelle sous le n° 01/25 ayant pour objet la déclaration de la vacance du siège du député Khalidj Omar et la désignation du député remplaçant ;

Après avoir pris connaissance de l’extrait de décès n° 06-2025 des registres de l’état civil, émanant du consulat général à Bruxelles-Belgique, en date du 2 janvier 2025 attestant le décès de M. Khalidj Omar à la même date, et ce, à vingt-etune heures et douze minutes (21:12) ;

Le membre rapporteur entendu,

Après délibération,

Attendu que l’article 215 de l’ordonnance n° 21-01 du 26 Rajab 1442 correspondant au 10 mars 2021, modifiée et complétée, portant loi organique relative au régime électoral, dispose que « Sans préjudice des dispositions constitutionnelles et législatives en vigueur, le député dont le siège devient vacant par suite de décès, de démission, d’empêchement légal, d’exclusion, de déchéance de son mandat électif ou d’acceptation de l’une des fonctions énumérées dans la loi organique fixant les cas d’incompatibilité avec le mandat parlementaire, est remplacé par le candidat ayant obtenu le plus grand nombre de voix après le dernier candidat élu de la liste, pour la période restante du mandat. » ;

Attendu qu’en vertu des dispositions de l’article 216 de l’ordonnance n° 21-01 du 26 Rajab 1442 correspondant au 10 mars 2021, modifiée et complétée, citée ci-dessus, qui prévoient que le bureau de l’Assemblée Populaire Nationale déclare la vacance du siège du député et la notifie immédiatement à la Cour constitutionnelle pour l’annonce de la vacance du siège et la désignation du candidat remplaçant ;

Attendu que le bureau de l’Assemblée Populaire Nationale s’est réuni le lundi 20 janvier 2025 et a déclaré la vacance du siège du député Khalidj Omar, par suite de décès ;

Attendu que le Président de l’Assemblée Populaire Nationale a sollicité la Cour constitutionnelle de déclarer la vacance du siège et de lui transmettre la décision de remplacement du député suscité ;

Attendu qu’après examen du dossier de remplacement du député Khalidj Omar et après avoir pris connaissance du certificat extrait des registres des décès de l’état civil émanant du consulat général de Bruxelles-Belgique suscité ;

Attendu que le député décédé est élu sur la liste du parti du Rassemblement National Démocratique, circonscription électorale de « Tlemcen » ;

Attendu qu’au vu de la proclamation du Conseil constitutionnel n° 01/P.C.C/21 du 12 Dhou El Kaâda 1442 correspondant au 23 juin 2021 portant résultats définitifs de l’élection des membres de l’Assemblée Populaire Nationale, et eu égard à la liste du parti du Rassemblement National Démocratique, circonscription électorale de « Tlemcen », il ressort que le candidat Saidani Zin El Abidine a obtenu 2300 voix, soit le plus grand nombre de voix après le dernier candidat élu sur la liste, et par conséquent, il est habilité à remplacer le député décédé, Khalidj Omar, et ce, pour la période restante du mandat parlementaire ;

Par ces motifs :

La Cour constitutionnelle décide de ce qui suit :

Premièrement : déclare la vacance du siège du député Khalidj Omar par suite de décès.

Deuxièmement : le député Khalidj Omar est remplacé par le candidat Saidani Zin El Abidine, de la même liste électorale, du parti du Rassemblement National Démocratique, circonscription électorale de « Tlemcen », pour la période restante du mandat parlementaire.

Troisièmement : la présente décision est notifiée au Président de l’Assemblée Populaire Nationale et au Président de l’Autorité nationale indépendante des élections.

Quatrièmement : la présente décision sera publiée au Journal officiel de la République algérienne démocratique et populaire.

Ainsi en a-t-il été délibéré par la Cour constitutionnelle en sa séance du 30 Rajab 1446 correspondant au 30 janvier 2025.

Le Président de la Cour constitutionnelle

Omar BELHADJ

 — Leïla ASLAOUI, membre ;

— Bahri SAADALLAH, membre ;

— Mosbah MENAS, membre ;

— Naceurdine SABER, membre ;

— Ourdia NAIT KACI, membre ;

— Abdelaziz BERGOUG, membre ;

— Abdelouahab KHERIEF, membre ;

— Bouziane ALIANE, membre ;

— Abdelhafid OSSOUKINE, membre ;

— Ammar BOUDIAF, membre ;

— Ahmed BENNINI, membre.

Décisions 2025

image_print

Décision N° 02/D. C.C/C.C/2025 du 20 Moharram 1447 correspondant au 16 juillet 2025 relative au contrôle de constitutionnalité d’articles du code de procédure pénale, adopté.

La Cour constitutionnelle, Sur saisine de la Cour constitutionnelle présentée par le député Abdelouahab Yakoubi, membre du groupe parlementaire du Mouvement de la Société pour la Paix, en sa qualité de mandataire des auteurs de la saisine, conformément aux dispositions des articles 192 (alinéa 2) et 193 (alinéa 2) de la Constitution, par une lettre enregistrée au greffe de la Cour constitutionnelle, en date du 9 juillet 2025, sous le n° 03/2025, accompagnée de la liste des noms, prénoms, signatures et copies des cartes de député des auteurs de la saisine, au nombre de 45, aux fins de contrôler la constitutionnalité des articles 8, 12, 47, 49, 83, 128, 204, 205, 294, 308 et 323, ainsi que les articles 539 à 544 et les articles 609 à 620, 652 et 768 du texte du code de procédure pénale, adopté ;

Vu la Constitution, notamment ses articles 116 (point 5), 185, 190 (alinéa 1er), 193 (alinéa 2), 196, 197 et 198 (alinéa 2) ;

Vu le règlement du 9 Safar 1444 correspondant au 5 septembre 2022 fixant les règles de fonctionnement de la Cour constitutionnelle en matière de contrôle de conformité des lois organiques à la Constitution ;

Les membres rapporteurs entendus ;

Après en avoir délibéré ;

En la forme :

Attendu que la saisine de la Cour constitutionnelle à l’effet de contrôler quelques articles du code de procédure pénale adopté, avant promulgation, est intervenue conformément aux dispositions de l’article 190 (alinéa 1er) de la Constitution, et aux articles 3 et 4 de la loi organique n° 22-19 du 26 Dhou El Hidja 1443 correspondant au 25 juillet 2022 fixant les procédures et modalités de saisine et de renvoi devant la Cour constitutionnelle et aux articles 3, 4, 6, 9, 10, 11 et 12 du règlement fixant les règles de fonctionnement de la Cour constitutionnelle, et est, donc, recevable en la forme.

Au fond :

Premièrement : en ce qui concerne la constitutionnalité de l’article 8 du code adopté.

Attendu que l’article 8, objet de saisine, stipule que :

« L’action publique ne peut être mise en mouvement à l’encontre des gestionnaires des entreprises publiques économiques de l’Etat qui détient la totalité des capitaux ou à capitaux mixtes, pour des actes de gestion ayant entraîné le vol, la dilapidation, le détournement, la détérioration ou la perte des deniers publics ou privés, que sur plainte préalable des organes sociaux de l’entreprise prévus par le code de commerce et la législation en vigueur.

Les membres des organes sociaux de l’entreprise qui s’abstiennent de dénoncer les faits à caractère délictueux portés à leur connaissance ou dont ils ont eu connaissance dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de leurs fonctions dans les entreprises mentionnées à l’alinéa 1er du présent article, sont passibles des peines prévues par la législation pertinente en vigueur. » ;

Attendu que les auteurs de la saisine estiment que l’exigence d’une « plainte préalable pour les infractions de gestion » pourrait instaurer une discrimination injustifiée dans la dénonciation de certaines infractions par rapport à d’autres, et restreindre la liberté du ministère public d’exercer des poursuites judiciaires au nom de la société, ce qui est susceptible de compromettre l’efficacité de la justice pénale dans la lutte contre les infractions de corruption ; ils sollicitent, donc, de déclarer l’inconstitutionnalité de l’article 8 précité, pour violation des articles 34, 37 et 163 de la Constitution et de son préambule, notamment le paragraphe relatif à la lutte contre la corruption et à la protection des deniers publics, ainsi qu’aux engagements internationaux, notamment ceux relatifs à la Convention des Nations Unies contre la corruption ;

Attendu que la condition de « plainte préalable » a été remplacée dans l’alinéa 2 de l’article précité par la criminalisation de la non-dénonciation pour les organes sociaux de l’entreprise, afin d’encourager les dirigeants intègres, de libérer l’activité économique, d’insuffler l’esprit d’initiative et d’éviter le désengagement des cadres compétents des postes de direction par crainte d’erreurs non intentionnelles. Il en découle que l’article, objet de saisine, ne contient rien qui puisse suggérer une dissimulation de la poursuite ou une entrave à la mise en mouvement de l’action publique au nom de la société, par le ministère public, dès lors que la poursuite est subordonnée à une plainte préalable émanant des organes sociaux de l’entreprise, lesquels, en leur qualité de membres dans l’entreprise et de participants à la gestion, sont en mesure de juger si les erreurs de gestion atteignent le seuil de la criminalité et, par conséquent, la portée de la responsabilité pénale est élargie et renforcée par l’incrimination, conformément à l’alinéa 2 de l’article susmentionné, la non dénonciation des faits à caractère pénal portés à la connaissance des organes sociaux de l’entreprise ou découverts par eux dans le cadre ou à l’occasion de l’exercice de leurs fonctions ;

Attendu que si l’action publique est conditionnée par une plainte préalable en raison de la nature particulière des infractions de gestion, la reconnaissance du droit du ministère public de la mise en mouvement de l’action publique à l’encontre des organes sociaux de l’entreprise compense la restriction de sa liberté de poursuite à l’encontre des dirigeants, et écarte ainsi tout soupçon d’inconstitutionnalité de la procédure ;

Attendu que la Cour constitutionnelle ne relève, donc, aucun indice d’inconstitutionnalité quant à l’article 8 susmentionné, à condition de respecter la réserve relative à l’obligation de se référer aux articles pertinents du code de commerce concernant les organes sociaux de l’entreprise, au niveau de l’alinéa 1er ainsi qu’à la détermination de la législation en vigueur à l’alinéa 2.

Deuxièmement : en ce qui concerne la constitutionnalité de l’article 652 de la loi objet de saisine.

Attendu que l’article 652 de la loi objet de saisine, dispose : « Ne peuvent pas être frappés de pourvoi en cassation :

1. les arrêts de la chambre d’accusation relatifs à la détention provisoire et au contrôle judiciaire ;

2. les arrêts de la chambre d’accusation de renvoi rendus par devant les juridictions … » ;

Attendu que les auteurs de la saisine sollicitent de déclarer l’inconstitutionnalité de l’article susmentionné, notamment ses points 1er et 2, au motif qu’il prive l’accusé de la possibilité d’exercer un pourvoi en cassation contre l’arrêt de renvoi, rendu par la chambre d’accusation devant les juridictions de jugement, ce qui contrevient selon eux au principe du double degré de juridiction, consacré par l’article 165 (alinéa 3) de la Constitution, ainsi qu’à l’article 44 de la Constitution qui sanctionne les actes de détention arbitraire. Selon eux, cette décision priverait l’accusé des garanties fondamentales d’un procès équitable et de son droit de se prévaloir de la présomption d’innocence, conformément à l’article 41 de la Constitution et à l’article 14 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques ;

Attendu que le droit au double degré de juridiction en matière pénale garanti par l’article 165 (alinéa 3) de la Constitution, ne s’étend pas à la Cour suprême, celle-ci étant une juridiction de droit et non de fond, et que le pourvoi en cassation ne constitue donc pas un degré de juridiction, dans la mesure où il ne représente pas une prolongation du litige initial et n’offre pas aux parties la possibilité d’y présenter de nouvelles demandes ou moyens de défense non soulevés auparavant, d’autant plus qu’il ne s’agit pas d’un jugement définitif dont les voies de recours ordinaires, ont été épuisées mais plutôt d’une procédure judiciaire préalable au procès, avec possibilité de recours en cas de condamnation, après renvoi sur le fond, conformément à l’article 165 de la Constitution ;

Attendu que l’article 139 point 7 de la Constitution confère au Parlement un large pouvoir discrétionnaire pour légiférer en matière de règles générales du droit pénal et de la procédure pénale. Il lui appartient de déterminer les conditions et les modalités du pourvoi en cassation, ainsi que d’introduire des exceptions et des restrictions, dans la loi, dans le respect des droits et des libertés garantis par la Constitution ;

Attendu que l’arrêt de renvoi devant la juridiction de jugement rendu par la chambre d’accusation constitue une mesure procédurale et non un jugement, dans la mesure où celle-ci ne statue pas sur le fond, mais agit en tant qu’organe de contrôle de l’instruction, concernant la liberté de l’accusé. Dès lors, et compte tenu de l’institution par le législateur du tribunal criminel d’appel en tant que juridiction de second degré en matière criminelle, ainsi que pour les délits et les contraventions qui leur sont connexes, les droits de l’accusé à un double degré de juridiction sont garantis par l’article 457 de la présente loi, adoptée, objet de saisine ;

Attendu que, par conséquent, en énumérant les cas d’irrecevabilité du pourvoi en cassation à l’article 652 et en y incluant au point 2 : – les arrêts de renvoi devant les juridictions de jugement rendus par la chambre d’accusation, aurait exercé la compétence qui lui a été conférée par le constituant. Dès lors, il n’a pas porté atteinte aux droits et aux libertés garantis par la Constitution, qu’il y a lieu de déclarer la constitutionnalité du point 2 de l’article 652 du code adopté, objet de saisine.

Troisièmement : en ce qui concerne la constitutionnalité des articles 83, 204 et 205 de la loi adoptée, objet de saisine.

Attendu que les auteurs de la saisine sollicitent de déclarer l’inconstitutionnalité des articles susmentionnés, pour leur violation de l’article 35, par lequel l’Etat garantit les droits et les libertés fondamentaux, de l’article 38 relatif au droit à la vie, de l’article 41 concernant la présomption d’innocence, de la Constitution ainsi que des articles 9 et 14 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, au motif que ces dispositions rendent la détention provisoire susceptible, d’office, de prolongation dans les crimes graves, ce qui constitue une atteinte à la présomption d’innocence et au caractère exceptionnel du recours à la détention provisoire ;

Attendu que la procédure de détention provisoire, prévue à l’alinéa 3 de l’article 44 de la Constitution, est encadrée par des cas précis et définis dans la loi, objet de saisine, qui en autorisent le recours en cas d’absence de garanties de comparution devant la justice, pour le bon déroulement de l’instruction, ou lorsque les mesures de contrôle judiciaire s’avèrent insuffisantes, selon des conditions légales précises quant à sa durée, ses motifs et les conditions de sa prolongation, tels que prévues par le code de procédure pénale, objet de saisine ;

Attendu que le législateur procédural dispose d’un pouvoir discrétionnaire pour déterminer les motifs, la durée et les conditions de prolongation de la détention provisoire, ainsi que les infractions graves justifiant cette prolongation en raison de leur gravité et de la complexité des actes d’instruction nécessaires à la manifestation de la vérité, notamment en matière de criminalité transfrontalière grave, comme cela a été consacré par le législateur dans les articles 83, 204 et 205 de la présente saisine ; Par conséquent, conformément à l’article 44, alinéa 3, de la Constitution, ainsi qu’aux articles 9 et 14 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, ratifié par la République algérienne en 1989, le législateur procédural est habilité à évaluer les infractions justifiant le recours légitime à la détention provisoire, à en fixer les motifs, la durée et les conditions de prolongation, en se fondant sur la gravité des infractions. Les articles 83, 204 et 205, objet de la présente saisine, ne sont pas entachés d’inconstitutionnalité.

Quatrièmement : en ce qui concerne la constitutionnalité de l’article 49 de la loi, objet de saisine :

Attendu que l’article 49 dispose : « Le procureur de la République peut, pour les nécessités de l’enquête, et sur rapport motivé de l’officier de police judiciaire, interdire, en vertu d’une ordonnance motivée, la sortie du territoire national de toute personne à l’encontre de laquelle il existe des indices faisant présumer sa probable implication dans un crime ou délit…

L’interdiction de sortie du territoire national est notifiée à l’intéressé. L’interdiction de sortie du territoire national, prise conformément aux dispositions de l’alinéa 1er, prend effet pour une durée de trois (3) mois, renouvelable une (1) seule fois. Toutefois, lorsqu’il s’agit des infractions de terrorisme, ou des autres infractions portant atteinte à la sûreté de l’Etat ou des infractions de corruption, l’interdiction peut être renouvelée jusqu’à la clôture de l’enquête. La levée de l’interdiction de sortie du territoire national est ordonnée selon les mêmes formes, soit d’office par le procureur de la République, soit à la demande de l’intéressé. » ;

Attendu que les auteurs de la saisine considèrent que cet article est de nature à restreindre la liberté de circulation et à porter atteinte à son essence. Ils demandent donc qu’il soit déclaré inconstitutionnel, car il contrevient à l’article 49 de la Constitution qui garantit à tout citoyen « le droit d’entrer et de sortir du territoire national. Ce droit ne peut être restreint que pour une durée déterminée par une décision motivée de l’autorité judiciaire ». Ils estiment que cet article est également contraire aux articles 41 relatif à la présomption d’innocence, 165 relatif au droit à la justice et 34 relatif à l’exigence que toute restriction législative ne porte pas atteinte à l’essence des droits et libertés, et à la proportionnalité des mesures restrictives des libertés de la Constitution ;

Attendu que le contenu de l’article 49, objet de saisine, en prévoyant la possibilité de recourir à la mesure d’interdiction de sortie du territoire national par ordonnance judiciaire motivée et pour une durée déterminée de trois (3) mois, renouvelable une seule fois, dans les cas de délits non graves, et pouvant être prolongée jusqu’à la fin des investigations dans les crimes graves ; admet que le législateur dispose d’un large pouvoir discrétionnaire, conformément à l’article 139 de la Constitution, pour évaluer la gravité des infractions nécessitant la prolongation de la mesure d’interdiction de sortie du territoire national pour les exigences de l’enquête ; que cette mesure est intrinsèquement liée, dans sa durée, à celle de l’instruction judiciaire ; dès lors, il n’y a aucun soupçon d’inconstitutionnalité dans le texte de l’article 49 précité, compte tenu de la marge d’appréciation que la Constitution confère au Parlement quant aux types d’infractions justifiant la prolongation de l’interdiction de sortie du territoire national pour les nécessités d’enquête et de poursuite ; de plus, cet article ne contrevient pas à l’alinéa 3 de l’article 12 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.

Cinquièmement : en ce qui concerne la constitutionnalité des articles 12, 49, 83, 114, 205, 294, 323 et 768 relatifs à l’absence de définition légale de l’expression « infractions commises au préjudice de la sécurité de l’Etat ».

Attendu que les articles susmentionnés prévoient la possibilité de prolonger les mesures de garde à vue et de détention provisoire, conformément aux règles établies pour la nécessité de l’enquête sur les infractions commises au préjudice de la sécurité de l’Etat, de la défense nationale ou de la sûreté nationale, par conséquent, les auteurs de la saisine sollicitent de déclarer leur inconstitutionnalité en raison de l’absence de définition légale prévue à l’article 34 de la Constitution, notamment l’alinéa 4 relatif à la lisibilité et à la prévisibilité de la loi ;

Attendu que l’expression « sécurité de l’Etat » est employée par le constituant dans l’article 79 alinéa 2, de la Constitution stipule que « La trahison, l’espionnage, le passage à l’ennemi, ainsi que toutes les infractions commises au préjudice de la sécurité de l’Etat, sont réprimés avec toute la rigueur de la loi ». En outre, la détermination de la liste des infractions et des peines qui leur sont applicables relève de la compétence du législateur pénal, conformément à l’alinéa 7 de l’article 139 de la Constitution, et non de celle du législateur procédural, dont la compétence est la légalité procédurale. Par conséquent, en se référant au code pénal, modifié et complété, les infractions contre la sécurité de l’Etat, sont définies de manière claire et précise dans le premier chapitre, sans ambiguïté ni confusion, sous le titre : « crimes et délits contre la sûreté de l’Etat » relevant du titre I du livre troisième de la deuxième partie intitulée « incrimination », ce qui élimine de l’expression, dont la constitutionnalité est contestée, tout soupçon de manque de définition légale dans les articles susmentionnés.

Sixièmement : en ce qui concerne les articles 539 à 544 relatifs aux procédures de reconnaissance préalable de culpabilité.

Attendu que le législateur procédural a prévu dans les articles précités la possibilité pour le procureur de la République de recourir d’office à une procédure de comparution fondée sur la reconnaissance préalable et non équivoque de la culpabilité dans les affaires délictuelles, et ce, à la demande de la personne concernée ou de son avocat. Il propose alors une peine légalement déterminée, parmi lesquelles l’auteur des faits peut choisir celle qui lui paraît la plus favorable, dans un délai de cinq (5) jours pour répondre à la proposition du procureur de la République, avant que l’affaire ne soit déférée devant le tribunal compétent ;

Attendu que les auteurs de la saisine estiment que les articles susmentionnés minorent le rôle de l’avocat dans la procédure de reconnaissance préalable de culpabilité, ce qui pourrait affecter psychologiquement l’inculpé qui reconnaît les faits, et porter ainsi atteinte à son droit à un procès équitable, conformément aux articles 37, 41, 164 et 165 de la Constitution, ainsi qu’à son droit à la défense, tel que garanti par les articles 41, 42 et 44 de la Constitution ;

Attendu que les procédures de reconnaissance préalable de culpabilité s’inscrivent dans le cadre de l’humanisation des peines dans la politique pénale contemporaine, à travers l’adoption de peines alternatives, ou de ce que l’on appelle la peine consensuelle, en cas de reconnaissance de culpabilité, tout en garantissant pleinement le droit à un procès équitable, sans porter atteinte aux articles 41, 42 et 44 de la Constitution, relatifs à l’inculpé, qui est présumé innocent jusqu’à preuve du contraire. Ils ne s’appliquent donc pas aux dispositions des articles 539 à 544 de la loi, objet de saisine, dès lors que la personne condamnée, par la peine proposée, a reconnu les faits de manière explicite, conformément au terme utilisé dans les articles précités : « celui qui a reconnu les faits ». Le soupçon d’inconstitutionnalité est donc écarté, car la procédure susmentionnée respecte le principe de proportionnalité entre l’infraction et la peine, ainsi que le principe d’individualisation des peines. Elle tient également compte de l’intérêt de la personne condamnée en lui permettant de choisir la peine la plus appropriée en récompense de sa prise de conscience lors de la reconnaissance de sa culpabilité ; En conclusion, il n’y a pas lieu de déclarer l’inconstitutionnalité des articles 539 à 544 de la loi susmentionnée.

Septièmement : en ce qui concerne la constitutionnalité de l’article 47 de la loi, objet de saisine.

Attendu que le texte de l’article susmentionné concerne les missions et les compétences du procureur de la République, notamment en ce qui concerne l’ordonnance de classement sans suite, par acte motivé pour des raisons légales ou pour inopportunité des poursuites ;

Attendu que les auteurs de la saisine sollicitent de déclarer l’inconstitutionnalité de cet alinéa, estimant qu’il porte atteinte au principe de légalité pénale et qu’il n’est soumis à aucun contrôle, ce qui pourrait conduire à un abus procédural dans le classement des affaires pour inopportunité, rendant ainsi cette disposition inconstitutionnelle en raison de son manque de clarté et de sa violation du principe de sécurité juridique ;

Attendu que la décision de classement sans suite d’une plainte pour inopportunité, constitue un pouvoir procédural du procureur de la République, exercé sous le contrôle du procureur général, et qu’il ne s’agit donc pas d’un pouvoir absolu. Dès lors, il n’y a pas lieu de soulever l’inconstitutionnalité, dans la mesure où le pouvoir est exercé en vertu d’une décision qui peut être révisée par le procureur général dans un délai de cinq (5) jours, à compter de sa notification, par toute personne ayant un intérêt de la décision de classement, qu’il s’agisse du plaignant ou de la victime, et ce, par tout moyen, conformément à l’article 47, tiret 4 de la loi, objet de saisine. De plus, le plaignant lésé peut, en sus de ce qui précède, se constituer partie civile devant le juge d’instruction, en tant que voie alternative pour poursuivre sa plainte, conformément aux dispositions procédurales en vigueur ; Par conséquent, il n’existe aucun soupçon d’inconstitutionnalité de l’article 47 susmentionné, dès lors qu’un droit de recours est prévu contre la décision de classement, à travers le contrôle exercé par le procureur général sur la décision du procureur de la République, et qu’il est également possible de se constituer partie civile devant le juge d’instruction.

Huitièmement : en ce qui concerne la constitutionnalité des articles 308 et 609 à 620 de la loi, objet de saisine.

Attendu que les articles 308 et 609 à 620 prévoient la possibilité de recourir, d’une manière facultative, aux convocations, notifications et avis par voie électronique, ce que les auteurs de la saisine considèrent comme une atteinte aux garanties prévues aux articles 40, 41 et 51 de la Constitution, à savoir, le droit à la défense, le principe de non-discrimination et le droit à l’information ;

Attendu que le recours aux convocations, notifications et avis électroniques en matière pénale s’inscrit dans le cadre de la transformation numérique initiée par l’Etat dans le cadre du programme de modernisation de la justice et d’amélioration des services judiciaires, tel que prévu par la loi n° 15-03 du 11 Rabie Ethani 1436 correspondant au 1er février 2015 relative à la modernisation de la justice, qui vise à renforcer la protection des droits et libertés en accélérant les procédures judiciaires, en réduisant les délais de règlement des litiges, et en économisant temps, efforts et argent ;

Attendu que, par conséquent, les notifications et les convocations à distance ne portent aucune atteinte au principe du procès équitable, puisqu’il s’agit simplement de substituer une procédure traditionnelle par une procédure électronique, ce qui est en droite ligne avec le rôle positif du pouvoir judiciaire dans l’amélioration de ses services. Tout soupçon d’inconstitutionnalité des articles susmentionnés est donc écarté. Par ces motifs :

La Cour constitutionnelle décide ce qui suit :

Premièrement : En la forme :

La saisine est recevable.

Deuxièmement : Au fond :

Déclare la constitutionnalité des articles 8 alinéa 1er, 12, 47, 49, 83, 128, 204, 205, 294, 308, 323 et les articles 539 à 544, 609 à 620, 652 et 768 des dispositions du code de procédure pénale, adopté, objet de saisine. Déclare la constitutionnalité de l’article 8 (alinéa 2) sous le bénéfice de la réserve susmentionnée.

Troisièmement : La présente décision est notifiée au Président de la République, au Président du Conseil de la Nation, au Président de l’Assemblée Populaire Nationale, au Premier ministre et au délégué des auteurs de la saisine.

Quatrièmement : La présente décision sera publiée au Journal officiel de la République algérienne démocratique et populaire.

Ainsi en a-t-il été délibéré par la Cour constitutionnelle en sa séance du 20 Moharram 1447 correspondant au 16 juillet 2025.

La Présidente de la Cour constitutionnelle

Leila ASLAOUI

— Bahri SAADALLAH, membre ;

— Mosbah MENAS, membre ;

— Naceurdine SABER, membre ;

— Ourdia NAIT KACI, membre ;

— Abdelaziz BERGOUG, membre ;

— Abdelouahab KHERIEF, membre ;

— Bouziane ALIANE, membre ;

— Abdelhafid OSSOUKINE, membre ;

— Ammar BOUDIAF, membre ;

— Ahmed BENNINI, membre.

Décision n° 03/ D.C.C/ C.C/ 25 du 17 Rabie El Aouel 1447 correspondant au 10 septembre 2025 relative à la saisine parlementaire concernant la constitutionnalité du report de l’ouverture de la session parlementaire de l’année 2025/2026.

La Cour constitutionnelle,

Sur saisine de la Cour constitutionnelle, présentée par le député Laïd Boukraf, président du groupe parlementaire du Mouvement de la société pour la paix, en sa qualité de délégué des auteurs de la saisine, conformément aux dispositions de l’article 193 (alinéa 2) de la Constitution, par lettre enregistrée au greffe de la Cour constitutionnelle, en date du 7 septembre 2025, sous le numéro 04/25, accompagnée d’une liste des noms, prénoms, signatures et copies des cartes des députés de l’Assemblée Populaire Nationale, au nombre de cinquante (50) députés, aux fins de « déclarer l’inconstitutionnalité de la décision de report de l’ouverture de la session parlementaire et de réaffirmer le principe de suprématie  de la Constitution, afin de garantir que de telles pratiques portant atteinte à la légitimité des institutions représentatives ne se reproduisent plus » ;

Vu la Constitution, notamment ses articles 116 (point 5), 190, 193 (alinéa 2) et 196 ;

Vu la loi organique n° 16-12 du 22 Dhou El Kaâda 1437 correspondant au 25 août 2016, modifiée et complétée, fixant l’organisation et le fonctionnement de l’Assemblée Populaire Nationale et du Conseil de la Nation ainsi que les relations fonctionnelles entre les chambres du Parlement et le Gouvernement ;

Vu la loi organique n° 22-19 du 26 Dhou El Hidja 1443 correspondant au 25 juillet 2022 fixant les procédures et modalités de saisine et de renvoi devant la Cour constitutionnelle, notamment son article 13 ;

Vu le règlement du 9 Safar 1444 correspondant au 5 septembre 2022 fixant les règles de fonctionnement de la Cour constitutionnelle, notamment ses articles 15 et 17 ;

Les deux membres rapporteurs entendus ;

Après en avoir délibéré ;

En la forme :

Attendu que la saisine de la Cour constitutionnelle aux fins de déclarer l’inconstitutionnalité de la décision de report de l’ouverture de la session parlementaire, présentée par cinquante (50) députés de l’Assemblée Populaire Nationale, en vertu d’une lettre motivée déposée par le délégué des auteurs de la saisine auprès du greffe de la Cour constitutionnelle, accompagnée d’une liste contenant les noms, prénoms, signatures et copies des cartes des députés auteurs de la saisine, est intervenue conformément à l’article 193 (alinéa 2) de la Constitution, et est recevable en la forme ;

Au fond :

Attendu que l’article 138 (alinéa 1er) de la Constitution stipule ce qui suit : « Le Parlement siège en une session ordinaire par an, d’une durée de dix (10) mois. Celle-ci commence le deuxième jour ouvrable du mois de septembre et se termine le dernier jour ouvrable du mois de juin » ;

Attendu que les auteurs de la saisine demandent à la Cour constitutionnelle de statuer sur la constitutionnalité de la décision de report de l’ouverture de la session parlementaire ordinaire prévue par la Constitution le deuxième jour ouvrable du mois de septembre et la sollicitent à l’effet de déclarer l’inconstitutionnalité de cette décision et de réaffirmer le principe de la suprématie de la Constitution ;

Attendu que l’article 190 de la Constitution a clairement défini le domaine de compétences de la Cour constitutionnelle qui consiste à se prononcer, par décision, sur la constitutionnalité des traités, des lois et des règlements, ainsi que sur la conformité du règlement intérieur de chacune des deux chambres du Parlement, à la Constitution ;

Attendu qu’il n’appartient pas à la Cour constitutionnelle d’examiner les mesures réglementaires internes ou les décisions de circonstances prises dans le cadre des prérogatives conférées au Parlement ;

Attendu que la Cour constitutionnelle, chargée de garantir le respect de la Constitution, est tenue, en vertu de ses dispositions, de rejeter toute saisine qui outrepasserait les limites de ses compétences ;

Attendu que la demande des auteurs de la saisine relative à la déclaration de l’inconstitutionnalité du report de l’ouverture de la session ordinaire prévue par l’article 138 de la Constitution, constitue un acte interne du Parlement lequel ne relève pas des compétences dévolues à la Cour constitutionnelle par l’article 190 de la Constitution, qu’il convient de déclarer l’incompétence de la Cour constitutionnelle pour statuer sur l’objet de la saisine ;

Par ces motifs 

La Cour constitutionnelle décide ce qui suit : 

Premièrement : En la forme :

La saisine est recevable

Deuxièmement : Au fond :

Déclare la saisine irrecevable car ne relevant pas de la compétence de la Cour constitutionnelle.

Troisièmement : La présente décision est notifiée au Président de la République, au Président du Conseil de la Nation, au Président de l’Assemblée Populaire Nationale, au Premier ministre et au délégué des auteurs de la saisine.

Quatrièmement : La présente décision sera publiée au Journal officiel de la République algérienne démocratique et populaire.

Ainsi en a-t-il été délibéré par la Cour constitutionnelle en sa séance du 17 Rabie El Aouel 1447 correspondant au 10 septembre 2025.

La Présidente de la Cour constitutionnelle

                                                        Leila ASLAOUI.

— Abbas AMMAR, membre ;

— Bahri SAADALLAH, membre ;

— Mosbah MENAS, membre ;

— Naceurdine SABER, membre ;

— Ourdia NAIT KACI, membre ;

— Abdelaziz BERGOUG, membre ;

— Abdelouahab KHERIEF, membre ;

— Bouziane ALIANE, membre ;

— Abdelhafid OSSOUKINE, membre ;

— Ammar BOUDIAF, membre ;

— Ahmed BENNINI, membre.

Décisions 2025

image_print

Décision n° 01/ D.C.C/ C.C/25 du 18 Moharram 1447 correspondant au 14 juillet 2025 relative au contrôle de conformité de la loi organique modifiant et complétant la loi organique n° 98-03 du 8 Safar 1419 correspondant au 3 juin 1998 relative aux compétences, à l’organisation et au fonctionnement du tribunal des conflits, à la Constitution.

La Cour constitutionnelle, Sur saisine de la Cour constitutionnelle par le Président de la République, conformément aux dispositions des articles 140 (alinéa 3), 190 (alinéa 5) et 193 (alinéa 1er) de la Constitution, par lettre datée du 24 juin 2025, transmise au secrétariat général de la Cour constitutionnelle, en date du 25 juin 2025 et enregistrée au secrétariat général, service du greffe, sous le numéro 01/2025, aux fins de contrôler la conformité de la loi organique modifiant et complétant la loi organique n° 98-03 du 8 Safar 1419 correspondant au 3 juin 1998 relative aux compétences, à l’organisation et au fonctionnement du tribunal des conflits, à la Constitution ;

Vu la Constitution, notamment les articles 34 (alinéa 4), 42, 140 (alinéas 2 et 3), 145 (alinéa 4), 148, 165, 179 (alinéas 4 et 5), 180, 181, 185, 190 (alinéa 5), 192 (alinéa 1er), 194, 197 (alinéa 2) et 198 (alinéas 2 et 5) ;

Vu la loi organique n° 98-01 du 4 Safar 1419 correspondant au 30 mai 1998, modifiée et complétée, relative aux compétences, à l’organisation et au fonctionnement du Conseil d’Etat ;

Vu la loi organique n° 98-03 du 8 Safar 1419 correspondant au 3 juin 1998 relative aux compétences, à l’organisation et au fonctionnement du tribunal des conflits ;

Vu la loi organique n° 04-11 du 21 Rajab 1425 correspondant au 6 septembre 2004 portant statut de la magistrature ;

Vu la loi organique n° 11-12 du 24 Chaâbane 1432 correspondant au 26 juillet 2011 fixant l’organisation, le fonctionnement et les compétences de la Cour suprême ;

Vu la loi organique n° 22-10 du 9 Dhou El Kaâda 1443 correspondant au 9 juin 2022 relative à l’organisation judiciaire ;

Vu la loi organique n° 22-12 du 27 Dhou El Kaâda 1443 correspondant au 27 juin 2022 fixant les modalités d’élection des membres du Conseil supérieur de la magistrature et ses règles d’organisation et de fonctionnement ;

Vu la loi organique n° 22-19 du 26 Dhou El Hidja 1443 correspondant au 25 juillet 2022 fixant les procédures et modalités de saisine et de renvoi devant la Cour constitutionnelle ;

Vu l’ordonnance n° 71-57 du 5 août 1971, modifiée et complétée, relative à l’assistance judiciaire ;

Vu la loi n° 08-09 du 18 Safar 1429 correspondant au 25 février 2008, modifiée et complétée, portant code de procédure civile et administrative ;

Vu la loi n° 15-03 du 11 Rabie Ethani 1436 correspondant au 1er février 2015 relative à la modernisation de la justice ;

Vu la loi n° 15-04 du 11 Rabie Ethani 1436 correspondant au 1er février 2015 fixant les règles générales relatives à la signature et à la certification électroniques ;

Vu la loi n° 22-07 du 4 Chaoual 1443 correspondant au 5 mai 2022 portant découpage judiciaire ;

Vu le règlement du 9 Safar 1444 correspondant au 5 septembre 2022 fixant les règles de fonctionnement de la Cour constitutionnelle ;

Vu le règlement intérieur de la Cour constitutionnelle du 10 Safar 1444 correspondant au 6 septembre 2022 ;

Les membres rapporteurs entendus ;

Après en avoir délibéré ;

En la forme :

Attendu que la loi organique modifiant et complétant la loi organique n° 98-03 du 8 Safar 1419 correspondant au 3 juin 1998 relative aux compétences, à l’organisation et au fonctionnement du tribunal des conflits, objet de saisine, a été déposée comme projet par le Premier ministre, après approbation du Conseil des ministres et avis du Conseil d’Etat, auprès du bureau de l’Assemblée Populaire Nationale ; qu’elle a été adoptée en séance plénière, le 17 mai 2025, puis adoptée par le Conseil de la Nation lors de sa séance plénière publique tenue le jeudi 19 juin 2025, conformément à l’article 143 de la Constitution ;

Attendu que le Président de la République a saisi la Cour constitutionnelle par lettre datée du 24 juin 2025, enregistrée au secrétariat général de la Cour constitutionnelle en date du 25 juin 2025, sous le numéro 01/2025, à l’effet de contrôler la conformité de la loi organique modifiant et complétant la loi organique n° 98-03 du 8 Safar 1419 correspondant au 3 juin 1998 relative aux compétences, à l’organisation et au fonctionnement du tribunal des conflits, à la Constitution ; Attendu que la saisine du Président de la République est conforme aux dispositions de l’article 190 (alinéa 5) de la Constitution, elle est recevable en la forme ;

Au fond :

Attendu que les articles concernés par l’amendement sont : l’article 1er, 2, 3, 5, 7, 8, 9, 12, 18, 19 et 20 de la loi organique n° 98-03 du 8 Safar 1419 correspondant au 3 juin 1998 relative aux compétences, à l’organisation et au fonctionnement du tribunal des conflits,

Premièrement : En ce qui concerne l’intitulé de la loi organique, objet de contrôle de conformité :

Attendu que la Cour constitutionnelle a constaté que la loi organique, soumise au contrôle de conformité, est intitulée comme suit : « Loi organique modifiant et complétant la loi organique n° 98-03 du 8 Safar 1419 correspondant au 3 juin 1998 relative aux compétences, à l’organisation et au fonctionnement du tribunal des conflits » ;

Attendu que l’article 179 (alinéa 5) de la Constitution stipule de manière claire et sans ambiguïté traduisant la volonté du constituant que « L’organisation, le fonctionnement et les attributions de la Cour suprême, du Conseil d’Etat et du tribunal des conflits sont fixés par une loi organique » ;

Attendu que l’intitulé de la loi organique soumise au contrôle ne reflète pas avec précision la formulation constitutionnellement adoptée, notamment en termes d’exhaustivité et de signification ; que la Cour rappelle que la conformité aux dispositions et à la terminologie de la Constitution porte tant sur le fond que sur la forme, ce qui inclut également la dénomination des textes juridiques, en tant qu’élément révélateur du degré de conformité entre la législation et la référence constitutionnelle ;

En conséquence de ce qui précède, et conformément à l’exigence de l’article 179 (alinéa 5) de la Constitution qui impose une concordance exacte entre l’intitulé de la loi organique et son domaine constitutionnel défini, la Cour constitutionnelle affirme que l’intitulé conforme aux dispositions de la Constitution doit être le suivant : « Loi organique relative à l’organisation, au fonctionnement et aux attributions du tribunal des conflits », en tant qu’intitulé traduisant la volonté constitutionnelle tant dans son texte que dans son esprit et exprimant avec précision le champ de la loi organique tel que prévu par la Constitution. Cela est également en harmonie avec l’article 5 de la loi organique n° 98-03, objet de saisine, qui a modifié l’intitulé de cette loi pour le reformuler comme suit : « Loi organique n° 98-03 du 8 Safar 1419 correspondant au 3 juin 1998 relative à l’organisation, au fonctionnement et aux attributions du tribunal des conflits ».

Deuxièmement : En ce qui concerne les articles 7, 8 et 9 de la loi organique, objet de saisine, pris ensemble en raison de leur unité de procédure, sont rédigés comme suit :

« Art. 7. — Le président du tribunal des conflits est nommé par le Président de la République, pour une durée de cinq (5) années, par alternance parmi les magistrats de la Cour suprême et ceux du Conseil d’Etat, sur proposition du président du bureau permanent du Conseil Supérieur de la Magistrature, après avis conforme de ce Conseil et consultation du Président du Conseil d’Etat pour les magistrats du Conseil d’Etat. ».

« Art. 8. — Les magistrats du tribunal des conflits sont nommés, pour une durée de cinq (5) années, par le Président de la République, de moitié parmi les magistrats de la Cour suprême et de moitié parmi les magistrats du Conseil d’Etat, sur proposition du président du bureau permanent du Conseil Supérieur de la Magistrature, après avis conforme de ce Conseil et consultation du Président du Conseil d’Etat pour les magistrats du Conseil d’Etat. ».

« Art. 9. — Un magistrat est nommé commissaire d’Etat par le Président de la République, pour une durée de cinq (5) années, par alternance entre les magistrats de la Cour suprême et les magistrats du Conseil d’Etat, sur proposition du président du bureau permanent du Conseil Supérieur de la Magistrature, après avis conforme de ce Conseil et consultation du Président du Conseil d’Etat pour les magistrats du Conseil d’Etat.

Un commissaire d’Etat adjoint est nommé, pour la même durée, dans les conditions prévues à l’alinéa 1er ci-dessus. ».

Attendu que l’objet de la présente saisine concerne la conformité de la loi organique n° 98-03 du 8 Safar 1419 correspondant au 3 juin 1998 relative à l’organisation du tribunal des conflits aux dispositions de la Constitution et non de la loi organique n° 22-12 du 27 Dhou El Kaâda 1443 correspondant au 27 juin 2022 qui fixe les modalités d’élection des membres du Conseil Supérieur de la Magistrature, ainsi que ses règles d’organisation et de fonctionnement ; Or, la loi organique, objet de saisine, bien que clairement délimitée dans son objet, contient dans ses articles 7, 8 et 9 des dispositions nouvelles qui confèrent au bureau permanent du Conseil Supérieur de la Magistrature une attribution inédite, non prévue dans le Titre III de la loi organique n° 22-12 précitée, ce qui soulève une problématique au regard du principe d’unité des lois organiques relatives à la magistrature. Ce principe exige que l’organisation d’un organe de nature constitutionnelle soit prévue dans une seule et même loi organique, de manière cohérente et intégrée, sans que ses dispositions ne soient fragmentées ou réparties entre différentes lois organiques, surtout lorsque cela risque de porter atteinte à ses attributions ou à l’équilibre de sa composition légale ;

Attendu que la Constitution, en son article 179, reconnaît l’existence d’un dualisme juridictionnel comprenant l’ordre judiciaire ordinaire dont la Cour suprême est l’organe suprême, et l’ordre judiciaire administratif, au sommet duquel figure le Conseil d’Etat ;

Attendu que les articles 180 et 181 de la Constitution confèrent au Conseil Supérieur de la Magistrature des prérogatives décisionnelles et consultatives en matière de gestion de la carrière des magistrats garantissant ainsi l’indépendance du pouvoir judiciaire ;

Attendu que le tribunal des conflits est composé d’un nombre égal de magistrats du Conseil d’Etat et de magistrats de la Cour suprême, et qu’il est présidé par alternance par l’un d’entre eux, ce qui garantit l’équilibre institutionnel et préserve l’indépendance de l’organe chargé de régler les conflits de compétence. Tout déséquilibre ou absence de garanties d’indépendance prévues par l’article 179 de la Constitution, est de nature à rendre la loi organique modifiant et complétant la loi organique relative au tribunal des conflits susceptible de non-conformité à la Constitution ;

Attendu que la nomination des magistrats au tribunal des conflits — juridiction de nature mixte relevant, à la fois de l’ordre judiciaire ordinaire et de l’ordre judiciaire administratif — se fait après consultation du Président du Conseil d’Etat pour les magistrats relevant de l’ordre judiciaire administratif, alors que le Premier Président de la Cour suprême n’est pas personnellement consulté pour les magistrats relevant de l’ordre judiciaire ordinaire ; l’avis conforme émane plutôt du Conseil Supérieur de la Magistrature, dont il assure la vice-présidence, conformément à l’article 41 de la loi organique n° 22-12 susmentionnée ;

Attendu que l’expression « avis conforme » contenue dans le texte renvoie à la volonté du législateur d’attribuer un rôle décisionnel au Conseil Supérieur de la Magistrature dans le processus de nomination, de sorte que le Président de la République ne peut nommer le président du tribunal des conflits qu’après approbation du candidat par ce Conseil ;

Attendu que la consultation du Président du Conseil d’Etat, lorsque le candidat est issu des magistrats de cette juridiction, ne vide pas l’avis conforme de sa teneur obligatoire, mais s’inscrit dans une logique de coordination institutionnelle, car elle permet au Président de la République de s’appuyer sur l’appréciation professionnelle émise par l’autorité d’origine du candidat, sans que cela n’entraîne d’effet contraignant, et constitue donc une mesure complémentaire, en adéquation aux exigences constitutionnelles ;

Attendu que la combinaison de l’avis conforme du Conseil Supérieur de la Magistrature — en tant qu’instance garante de l’indépendance du pouvoir judiciaire — et de la consultation du Président du Conseil d’Etat, ne remet pas en cause le principe d’unité de l’autorité de nomination ni celui de la séparation des pouvoirs, tant que la décision finale demeure entre les mains du Président de la République ;

Attendu qu’ainsi, l’article 7 de cette loi organique n’est pas en contradiction avec les dispositions de la Constitution et y est conforme. Cependant, des réserves sont émises quant à la formulation technique et à la clarté législative du texte, en raison de la multiplicité et de l’accumulation des instances intervenantes : le président du bureau permanent du Conseil Supérieur de la Magistrature, le Conseil Supérieur de la Magistrature (avis conforme), le Président du Conseil d’Etat (consultation) et le Président de la République (décision de nomination), ce qui constitue un obstacle à la clarté de la procédure, d’autant plus que l’ordre des interventions n’est pas suffisamment détaillé dans le texte ;

Attendu, d’une part, que l’usage injustifié de deux termes différents, « avis conforme » et « consultation » dans un même article, sans clarification fonctionnelle explicite, est de nature à créer une confusion, notamment chez les profanes, en raison de l’utilisation d’une phrase longue et complexe comprenant plusieurs conditions et incises (alternativement, sur proposition, après avis, et consultation…), ce qui engendre une lourdeur linguistique et nuit à la compréhension immédiate de la procédure ;

Attendu, que la formulation de l’article 8 consacre le principe d’alternance et d’équilibre entre les magistrats nommés issus des deux plus hautes juridictions de l’Etat et qu’elle ne contient rien qui contrevienne à la Constitution ; néanmoins, les mêmes réserves formelles que celles émises à l’égard de l’article 7 lui sont également applicables ;

Attendu qu’en ce qui concerne l’article 9, et conformément à la pratique juridictionnelle établie, le rôle du commissaire d’Etat au sein du Conseil d’Etat est reconnu comme équivalant à celui du ministère public, fonction qu’il exerce avec l’assistance de commissaires d’Etat adjoints ;

Attendu que l’introduction d’un poste portant la même dénomination au sein du tribunal des conflits, sans précision claire de ses attributions ou de ses pouvoirs, soulève une problématique structurelle dans l’organisation judiciaire, notamment en ce qui concerne la clarté des concepts et la distinction des fonctions ; En effet, l’utilisation de la même appellation « commissaire d’Etat » dans deux juridictions indépendantes, tant sur le plan fonctionnel qu’organisationnel, et en l’absence de lien organique entre elles, est susceptible d’induire une confusion dans la compréhension juridique, tant pour les acteurs judiciaires que pour les spécialistes. Alors que le rôle du commissaire d’Etat au Conseil d’Etat est clairement défini dans le domaine des recours administratifs et de l’émission d’avis juridiques, la loi organique régissant le tribunal des conflits a omis de définir les attributions du commissaire d’Etat en son sein ouvrant ainsi la voie à de multiples interprétations et portant atteinte au principe de sécurité juridique expressément consacré au 15ème paragraphe du préambule de la Constitution, et réaffirmé à l’article 34 (alinéa 4) de la Constitution, qui impose la clarté et l’intelligibilité des règles juridiques ;

Attendu que, sur la base de ce qui précède, la Cour constitutionnelle estime que le maintien de l’appellation actuelle de « commissaire d’Etat » au sein de la composition du tribunal des conflits, sans lien fonctionnel ou structurel avec son homologue du Conseil d’Etat, constitue une source d’ambiguïté et une dualité injustifiée dans la description fonctionnelle ;

Considérant que la clarté des textes juridiques, notamment ceux régissant les institutions judiciaires, constitue une condition substantielle pour garantir la stabilité des statuts juridiques et la protection des droits. Par conséquent, l’ambiguïté contenue dans les articles 7, 8 et 9, eu égard à son impact direct sur les mécanismes de nomination juridictionnelle, n’est pas conforme aux exigences de la Constitution, ce qui justifie l’émission de réserves à leur égard pour non satisfaction du critère de clarté, qui constitue l’un des piliers de la légalité constitutionnelle en matière de législation.

Troisièmement : En ce qui concerne l’emploi d’un terme non conforme à la Constitution contenu dans l’article 20 (alinéa 3) :

Attendu que l’article 20, dans son alinéa in fine, contient l’expression : « les collectivités publiques sont représentées … », tandis que le terme consacré par l’article 17 de la Constitution est : « les collectivités territoriales de l’Etat » ;

Attendu qu’à l’exception des réserves émises à l’égard de certaines dispositions, toutes les dispositions de la loi organique modifiant la loi organique précitée ont été élaborées dans le respect des dispositions de la Constitution et des exigences de la légalité constitutionnelle, ce qui leur confère une présomption de validité et consacre leur légitimité au sein de l’ordre juridique national, par la solidité de leur assise constitutionnelle, en adéquation avec les normes découlant du texte et de l’esprit de la Constitution, ce qui leur confère un caractère de cohérence et de conformité.

Par ces motifs :

La Cour constitutionnelle décide ce qui suit :

Premièrement : En la forme :

La saisine de la Cour constitutionnelle par le Président de la République, à l’effet de contrôler la conformité de cette loi organique à la Constitution, a été effectuée conformément aux conditions prévues à l’article 190 (alinéa 5) de la Constitution. Elle est, donc, formellement conforme à la Constitution.

Deuxièmement : Au fond :

La Cour constitutionnelle déclare la conformité à la Constitution de la loi organique modifiant et complétant la loi organique n° 98-03 du 8 Safar 1419 correspondant au 3 juin 1998 relative à l’organisation, au fonctionnement et aux attributions du tribunal des conflits, sous réserve de la prise en compte des réserves émises à l’égard de ses articles 7, 8 et 9.

L’expression « collectivités publiques » contenue dans l’article 20 (alinéa in fine) est remplacée par l’expression « collectivités territoriales de l’Etat ».

La présente décision est notifiée au Président de la République.

La présente décision sera publiée au Journal officiel de la République algérienne démocratique et populaire.

Ainsi en a-t-il été délibéré par la Cour constitutionnelle en sa séance du 18 Moharram 1447 correspondant au 14 juillet 2025.

La Présidente de la Cour constitutionnelle

Leila ASLAOUI

— Bahri Saadallah, membre ;

— Mosbah Menas, membre ;

— Naceurdine Saber, membre ;

— Ourdia Nait Kaci, membre ;

— Abdelaziz Bergoug, membre ;

— Abdelouahab Kherief, membre ;

— Bouziane Aliane, membre ;

— Abdelhafid Ossoukine, membre ;

— Ammar Boudiaf, membre ;

— Ahmed Bennini, membre.

 

Avis 2025

image_print

Avis n° 01 A.C.C/I.C/25 du 30 Rajab 1446 correspondant au 30 janvier 2025 relatif à l’interprétation des dispositions de l’article 158 de la Constitution.

 La Cour constitutionnelle,

Sur saisine déposée par le député M. Abdelouahabe Yakoubi, délégué des députés à l’Assemblée Populaire Nationale, auprès de la Cour constitutionnelle, conformément aux dispositions des articles 192 (alinéa 2) et 193 (alinéa 2) de la Constitution, par lettre datée du 2 janvier 2025 et enregistrée au greffe de la Cour constitutionnelle, le 2 janvier 2025, sous le n° 01/25, aux fins d’interpréter les dispositions de l’article 158 de la Constitution ;

Vu la Constitution, notamment ses articles 114, 115, 116 (tiret 5), 118, 121, 122, 160, 185, 192 (alinéa 2), 193 (alinéa 2), 194, 196, 197 (alinéa 1er) et 198 (alinéa in fine) ;

Vu la loi organique n° 16-12 du 22 Dhou El Kaâda 1437 correspondant au 25 août 2016, modifiée et complétée, fixant l’organisation et le fonctionnement de l’Assemblée Populaire Nationale et du Conseil de la Nation ainsi que les relations fonctionnelles entre les chambres du Parlement et le Gouvernement, notamment ses articles de 69 à 76 ;

Vu la loi organique n° 22-19 du 26 Dhou El Hidja 1443 correspondant au 25 juillet 2022 fixant les procédures et modalités de saisine et de renvoi devant la Cour constitutionnelle, notamment son article 13 ;

Vu le règlement intérieur de l’Assemblée Populaire Nationale, publié en date du 28 Rabie Ethani 1421 correspondant au 30 juillet 2000 (avis du Conseil constitutionnel n° 10/A.R.I/ C.C/2000 du 9 Safar 1421 correspondant au 13 mai 2000 ;

Vu la loi n° 01-01 du 6 Dhou El Kaâda 1421 correspondant au 31 janvier 2001 relative au membre du Parlement ;

Vu le décret exécutif n° 98-04 du 19 Ramadhan 1418 correspondant au 17 janvier 1998 fixant les attributions du ministre chargé des relations avec le Parlement ;

Vu le règlement du 9 Safar 1444 correspondant au 5 septembre 2022 fixant les règles de fonctionnement de la Cour constitutionnelle, notamment ses articles 15 et 17 ;

Vu le règlement intérieur de la Cour constitutionnelle du 10 Safar 1444 correspondant au 6 septembre 2022, notamment ses articles 29, 31, 32, 33, 34, 35 et 36 ;

Les deux membres rapporteurs entendus ;

Après en avoir délibéré ;

En la forme :

— Attendu que la saisine de la Cour constitutionnelle à l’effet d’interpréter les dispositions de l’article 158 de la Constitution, introduite par quarante-cinq (45) députés à l’Assemblée Populaire Nationale, au moyen d’une lettre déposée par le délégué des auteurs de la saisine auprès du greffe de la Cour constitutionnelle, accompagnée d’une liste comportant les noms, prénoms, signatures et copies des cartes de député des quarante-cinq (45) députés auteurs de la saisine, est intervenue conformément aux articles 192 (alinéa 2) et 193 (alinéa 2) de la Constitution et, donc recevable en la forme.

Au fond :

— Attendu que l’article 158 de la Constitution, objet de la demande d’interprétation, prévoit que : « Les membres du Parlement peuvent adresser, par voie orale ou en la forme écrite, toute question à tout membre du Gouvernement. La question écrite reçoit en la même forme une réponse dans un délai maximal de trente (30) jours. Pour les questions orales, le délai de réponse ne doit pas excéder trente (30) jours. L’Assemblée Populaire Nationale et le Conseil de la Nation tiennent, alternativement, une séance hebdomadaire consacrée aux réponses du Gouvernement aux questions orales des députés et des membres du Conseil de la Nation.

Si l’une des deux chambres estime que la réponse, orale ou écrite, du membre du Gouvernement le justifie, un débat est ouvert dans les conditions que prévoient les règlements intérieurs de l’Assemblée Populaire Nationale et du Conseil de la Nation. Les questions et les réponses sont publiées dans les mêmes conditions que les procès-verbaux des débats du Parlement » ;

— Attendu que les dispositions de l’article 158 susmentionné, sont claires et rédigées de manière rigide dans tous ses alinéas, ne comportent aucune ambiguïté, contradiction ou obscurité nécessitant une interprétation selon l’intention du constituant ;

— Attendu que les auteurs de la saisine ont fondé leur demande d’interprétation sur les motifs suivants :

  1. éviter tout malentendu institutionnel entre les pouvoirs exécutif et législatif ;
  2. garantir l’application correcte de la Constitution, conformément à l’esprit de la loi suprême de la République ;
  3. remédier à l’absence d’outils de contrôle efficaces, tels que les questions d’actualité ;
  4. prévenir toute violation de la Constitution pouvant survenir du non-respect des délais qu’elle fixe ;

— Attendu que l’objet et le fondement de la saisine sont intrinsèquement liés au règlement intérieur de l’Assemblée Populaire Nationale, lequel contient les solutions à toutes les questions soulevées dans la demande d’interprétation ;

— Attendu que la présente saisine parlementaire portant sur la demande d’interprétation des dispositions constitutionnelles de l’article 158 de la Constitution n’est pas fondée, dès lors que le texte est clair et que les dispositions dont l’interprétation est demandée sont dénuées de toute ambiguïté;

— Attendu qu’une interprétation extensive des dispositions claires pourrait aboutir à une modification indirecte de la Constitution en dehors des procédures constitutionnellement établies, et conduire également à l’élaboration d’une nouvelle Constitution résultant d’une interprétation parallèle du juge constitutionnel à la Constitution écrite, adoptée par le pouvoir constituant ;

— Attendu que le traitement de l’objet de la saisine soulevée concerne des questions d’organisation interne relatives au fonctionnement de l’Assemblée Populaire Nationale et à ses relations avec le Gouvernement, et qu’il n’a donc aucun lien avec l’interprétation de l’article 158 de la Constitution, lequel est clair dans toutes ses dispositions sans aucune confusion ou contradiction, qu’il convient, dès lors, de déclarer le rejet de la saisine pour non-fondement ;

Par ces motifs, la Cour constitutionnelle émet l’avis suivant :

Premièrement : En la forme :

La saisine est recevable.

Deuxièmement : Au fond :

Rejet de la saisine en raison de la clarté de l’article 158 de la Constitution dans toutes ses dispositions.

Troisièmement : Le présent avis sera notifié au Président de la République, au Président du Conseil de la Nation, au Président de l’Assemblée Populaire Nationale, au Premier ministre et au délégué des auteurs de la saisine.

Quatrièmement : Le présent avis sera publié au Journal officiel de la République algérienne démocratique et populaire.

Ainsi en a-t-il été délibéré par la Cour constitutionnelle en sa séance tenue le 30 Rajab 1446 correspondant au 30 janvier 2025.

Le Président de la Cour constitutionnelle

Omar BELHADJ

 

— Leïla ASLAOUI, membre ;

— Bahri SAADALLAH, membre ;

— Mosbah MENAS, membre ;

— Naceurdine SABER, membre ;

— Ourdia NAIT KACI, membre ;

— Abdelaziz BERGOUG, membre ;

— Abdelouahab KHERIEF, membre ;

— Bouziane ALIANE, membre ;

— Abdelhafid OSSOUKINE, membre ;

— Ammar BOUDIAF, membre ;

— Ahmed BENNINI, membre

Avis n° 02/A.C.C/I.C/25 du 6 Chaâbane 1446 correspondant au 5 février 2025 relatif à l’interprétation des dispositions des articles 121 et 122 de la Constitution.

  La Cour constitutionnelle,

Sur saisine déposée par Romani Mohamed, membre du Conseil de la Nation et délégué des auteurs de la saisine, conformément aux dispositions des articles 192 (alinéa 2) et 193 (alinéa 2) de la Constitution, par lettre datée du 27 janvier 2025, enregistrée au greffe de la Cour constitutionnelle à la même date sous le numéro 25/02, aux fins d’interpréter les dispositions des articles 121 et 122 de la Constitution ;

Vu la Constitution, notamment ses articles 114, 116 (tiret 5), 118, 121, 122, 160, 185, 192 (alinéa 2), 193 (alinéa 2), 194, 196, 197 (alinéa 1er) et 198 (alinéa in fine) ;

Vu la loi organique n°16-12 du 22 Dhou El Kaâda 1437 correspondant au 25 août 2016, modifiée et complétée, fixant l’organisation et le fonctionnement de l’Assemblée Populaire Nationale et le Conseil de la Nation, ainsi que les relations fonctionnelles entre les chambres du Parlement et le Gouvernement, notamment ses articles de 69 à 76 ;

Vu la loi organique n° 22-19 du 26 Dhou El Hidja 1443 correspondant au 25 juillet 2022 fixant les procédures et modalités de saisine et de renvoi devant la Cour Constitutionnelle, notamment son article 13 ;

Vu la loi n° 84-09 du 4 février 1984, modifiée et complétée, relative à l’organisation territoriale du pays ;

Vu la loi n° 01-01 du 6 Dhou El Kaâda 1421 correspondant au 31 janvier 2001 relative au membre du Parlement ;

Vu l’ordonnance n° 21-01 du 26 Rajab 1442 correspondant au 10 mars 2021, modifiée et complétée, portant loi organique relative au régime électoral, notamment ses articles 217, 218, 219, 220, 238, 239, 240 et 241 ;

Vu l’ordonnance n° 21-02 du 2 Chaâbane 1442 correspondant au 16 mars 2021 déterminant les circonscriptions électorales et le nombre de sièges à pourvoir pour les élections du Parlement ;

Vu le règlement intérieur du Conseil de la Nation du 30 Dhou El Kaâda 1438 correspondant au 22 août 2017 ;

Vu le règlement du 9 Safar 1444 correspondant au 5 septembre 2022 fixant les règles de fonctionnement de la Cour constitutionnelle, notamment ses articles 15 et 17 ;

Vu le règlement intérieur de la Cour constitutionnelle du 10 Safar 1444 correspondant au 6 septembre 2022, notamment ses articles 29, 30, 31, 32, 33, 34, 35 et 36 ;

Vu la proclamation de la Cour constitutionnelle n° 01/P.C.C/22 du 9 Rajab 1443 correspondant au 10 février 2022 portant résultats définitifs du renouvellement de la moitié des membres élus du Conseil de la Nation, ainsi que l’élection des membres du Conseil de la Nation des nouvelles wilayas ;

Vu le décret présidentiel n° 21-513 du 17 Joumada El Oula 1443 correspondant au 22 décembre 2021 portant convocation du collège électoral en vue du renouvellement de la moitié des membres élus du Conseil de la Nation ainsi que l’élection des membres du Conseil de la Nation des nouvelles wilayas ;

Vu le décret présidentiel n° 25-56 du 22 Rajab 1446 correspondant au 22 janvier 2025 portant convocation du collège électoral en vue du renouvellement de la moitié des membres élus du Conseil de la Nation ;

Vu l’avis n° 03/A.C.C/I.C/24 du 22 Joumada El Oula 1446 correspondant au 24 novembre 2024 relatif à l’interprétation de la disposition contenue dans l’article 122 (alinéa in fine) de la Constitution ; Les membres rapporteurs entendus ;

Après en avoir délibéré ;

En la forme :

Attendu que la saisine de la Cour constitutionnelle aux fins d’interpréter les dispositions des articles 121 et 122 de la Constitution quant à la question du renouvellement de la moitié des membres élus du Conseil de la Nation des dix (10) nouvelles wilayas, présentée par vingt-cinq (25) membres du Conseil de la Nation, par lettre déposée par le délégué des auteurs de la saisine au greffe de la Cour constitutionnelle à laquelle est jointe la liste des noms, prénoms, signatures et copies de la carte de membre de vingt-cinq (25) membres, est intervenue conformément aux articles 192 (alinéa 2) et 193 (alinéa 2) de la Constitution et, par conséquent, est recevable en la forme.

Au fond :

Attendu que l’article 121 de la Constitution dispose ce qui suit : « Les membres de l’Assemblée Populaire Nationale sont élus au suffrage universel direct et secret. Les membres du Conseil de la Nation sont élus pour les deux tiers (2/3) au suffrage indirect et secret, à raison de deux (2) sièges par wilaya, parmi les membres des Assemblées Populaires Communales et des membres des Assemblées Populaires de wilayas. Un tiers (1/3) des membres du Conseil de la Nation est désigné par le Président de la République parmi les personnalités et compétences nationales dans les domaines scientifique, professionnel, économique et social ».

L’article 122 de la Constitution dispose ce qui suit : « L’Assemblée Populaire Nationale est élue pour un mandat de cinq (5) ans. Le mandat du Conseil de la Nation est fixé à six (6) ans. La composition du Conseil de la Nation est renouvelable par moitié tous les trois (3) ans. Le mandat du Parlement ne peut être prolongé qu’en cas de circonstances exceptionnellement graves, empêchant le déroulement normal des élections. Cette situation est constatée par décision du Parlement, siégeant les deux chambres réunies sur proposition du Président de la République, la Cour constitutionnelle consultée. Nul ne peut exercer plus de deux (2) mandats parlementaires consécutifs ou séparés ».

Attendu que la question constitutionnelle soulevée par les membres du Conseil de la Nation dans leur saisine, réside dans l’application du renouvellement de la moitié des dix (10) nouvelles wilayas conformément à l’article 121 de la Constitution, en vertu duquel la composition du Conseil de la Nation est renouvelable par moitié tous les trois (3) ans, compte tenu des dix (10) nouvelles wilayas dans lesquelles seront élus pour la première fois deux (2) députés pour chaque wilaya ;

Attendu qu’il ressort de la lettre des auteurs de la saisine l’interprétation implicite de l’article 121 de la Constitution qui prévoit qu’en cas de l’application du renouvellement partiel après trois (3) ans, l’un des députés sera exclu avant même qu’il ait terminé son mandat de six (6) ans, ce qui contrevient aux dispositions de l’article 122 de la Constitution qui fixe la durée du mandat à six (6) ans ;

Attendu qu’eu égard au silence du règlement intérieur du Conseil de la Nation du 22 août 2017 n’ayant pas prévu des dispositions particulières sur le renouvellement de la moitié des nouvelles wilayas et c’est également le cas pour la loi organique n° 23-06 du 28 Chaoual 1444 correspondant au 18 mai 2023 modifiant et complétant la loi organique n° 16-12 du 22 Dhou El Kaâda 1437 correspondant au 25 août 2016 fixant l’organisation et le fonctionnement de l’Assemblée Populaire Nationale et du Conseil de la Nation, ainsi que les relations fonctionnelles entre les chambres du Parlement et le Gouvernement qui, en vertu de ses dispositions, régit les élections et le renouvellement partiel ;

Attendu que les auteurs de la saisine estiment que l’application du renouvellement partiel dans les nouvelles wilayas serait de nature à entraîner l’exclusion de l’un des deux élus avant même l’expiration de son mandat, ce qui porte atteinte au principe d’égalité entre les membres et affecte la représentation des nouvelles wilayas de manière équitable, d’où la nécessité pour chaque député, selon eux, d’accomplir son mandat de six (6) ans, sans exclusion et avant l’expiration de la durée du mandat conformément à ce que prévoit la Constitution de 2020 ;

Attendu que le rôle de la Cour constitutionnelle dans l’interprétation des dispositions ambigües se limite à clarifier l’intention du constituant, notamment dans le cas de survenance de difficultés lors de leur application, et que dans ce cas-là, il s’agit d’un vide que le législateur n’avait pas prévu, qu’il y a lieu d’y remédier à travers l’interprétation en vertu de l’article 192 (alinéa 2) de la Constitution qui confère à la Cour constitutionnelle de rendre son avis interprétatif par l’autorité de la chose interprétée ;

Attendu que les deux tiers (2/3) des membres du Conseil de la Nation sont élus au suffrage indirect et secret ;

Attendu que la Cour constitutionnelle de par son approche interprétative instaurée dans ses avis n° 23/01 du 20 Moharram 1445 correspondant au 7 août 2023, n° 24/01 du 4 Rajab 1445 correspondant au 15 janvier 2024 et n° 24/03 du 22 Joumada El Oula 1446 correspondant au 24 novembre 2024, affirme que l’interprétation d’une disposition contenue dans la Constitution ne peut se faire indépendamment de celles déterminées par d’autres dispositions de la Constitution ayant un lien avec la disposition, objet de l’interprétation, et ce, eu égard au rang et à la primauté de la Constitution, formant un seul et unique dispositif indivisible. Cela étant, il est impératif d’établir un lien entre les dispositions constitutionnelles afin de lever toute ambiguïté et équivoque entachant le corps du texte, à l’effet d’établir l’exacte signification et teneur, faciliter une meilleure compréhension de son contenu et de son objectif, et pour assurer une application uniforme ;

Attendu que l’adoption du système de suffrage indirect pour l’élection des membres du Conseil de la Nation ainsi que le renouvellement partiel tous les trois (3) ans a pour objet la représentation des assemblées locales au Conseil de la Nation, d’une part, et d’assurer la non vacance de cette chambre étant donné qu’elle garantit la continuité de l’Etat, d’autre part ;

Attendu que la création de dix (10) wilayas nouvelles après les élections locales qui ont eu lieu en 2021 a créé une situation nouvelle qui consiste en l’existence de ces wilayas sans assemblées populaires de wilayas dépendant toujours des wilayas mères ;

Attendu que le renouvellement de la moitié des membres du Conseil de la Nation élus en 2022 coïncide avec cette situation aboutissant à l’élection de deux (2) nouveaux membres du Conseil de la Nation dans chaque nouvelle wilaya ;

Attendu que le collège électoral pour l’élection des membres du Conseil de la Nation se compose de membres des assemblées populaires de wilayas et communales de chaque wilaya ;

Attendu que les résultats de l’élection des membres du Conseil de la Nation des nouvelles wilayas qui ont eu lieu en 2022 n’ont soulevé aucune problématique, tant au niveau de l’Autorité nationale indépendante des élections en sa qualité d’Autorité qui supervise, organise et annonce les résultats provisoires desdites élections, qu’au niveau de la Cour constitutionnelle qui est habilitée à statuer sur les recours relatifs aux résultats provisoires et à en proclamer les résultats définitifs ;

Attendu que la Cour constitutionnelle n’a enregistré aucun recours quant à la composition du collège électoral pour l’élection des membres du Conseil de la Nation des nouvelles wilayas pour l’année 2022 ;

Par conséquent, la tenue des élections pour le renouvellement de la moitié des membres du Conseil de la Nation élus dans les nouvelles wilayas ne soulève aucun problème juridique, dès lors le collège électoral est composé de membres des assemblées populaires communales qui dépendent de ces wilayas.

Attendu que l’article 122 (alinéa 3) de la Constitution prévoit clairement et sans exception ou privilèges à une partie de membres du Conseil de la Nation que « la composition du Conseil de la Nation est renouvelable par moitié tous les trois (3) ans ».

Attendu que les alinéas 2 et 3 de l’article 122 de la Constitution disposent que le mandat du Conseil de la Nation est fixé à six (6) ans, et que sa composition est renouvelable par moitié tous les trois (3) ans, et que l’alinéa 2 de l’article 121 susmentionné prévoit que les membres du Conseil de la Nation sont élus pour les deux tiers (2/3) au suffrage indirect et secret, à raison de deux (2) sièges par wilaya, parmi les membres des assemblées populaires communales et des membres des assemblées populaires de wilayas, et que par le renouvellement partiel de la composition du Conseil de la Nation, le constituant vise la préservation de sa continuité et de son bon fonctionnement, grâce à l’expérience des membres restants après le renouvellement.

Attendu qu’en vertu de l’avis de la Cour constitutionnelle sur l’interprétation de l’article 122 de la Constitution, et l’avis qui jouit de l’autorité de la chose interprétée et que par analogie, étant donné que l’élection de l’Assemblée Populaire Nationale se fait directement par le peuple afin de représenter les citoyens dans leur ensemble, le Conseil de la Nation est élu d’une manière différente, soit l’élection indirecte à travers la participation des élus locaux dans l’élection des membres parmi eux, afin de représenter l’ensemble des collectivités locales de façon à réaliser, dans le cadre du système de décentralisation de l’administration, une harmonisation entre les principes de l’indivisibilité et de la souveraineté nationale d’une part et la représentation des collectivités locales qui constituent l’Etat d’autre part.

Attendu que le renouvellement de la moitié des membres élus ainsi que des membres désignés, conformément à l’article 122 (alinéa 3) doit se faire tous les trois (3) ans, de manière à ce que tous les membres bénéficient successivement d’un mandat complet pour la durée de six (6) ans.

Attendu que le premier renouvellement de la moitié des dix (10) nouvelles wilayas représentées pour la première fois au Conseil de la Nation est un cas exceptionnel.

Attendu que la moitié des membres représentant les nouvelles wilayas bénéficient d’un mandat complet, tandis que l’autre moitié est obligatoirement renouvelable à l’occasion du premier renouvellement après les trois (3) premières années de leur mandat, et c’est ce qui s’est passé exactement lors du premier renouvellement de la moitié de la composition du Conseil de la Nation dans le cadre de la Constitution de 1996. Cela étant juste une disposition transitoire, étant donné que par la suite, le mandat de tous les membres est de six (6) ans complets et sans exception, et que sans cette disposition exceptionnelle, le renouvellement partiel de la composition du Conseil de la Nation ne peut se faire périodiquement dans ces wilayas d’une part, et d’autre part, l’exception confirme la règle constitutionnelle tant dans la lettre que dans l’esprit, conformément à l’article 122 de la Constitution de manière à réaliser le libre choix du peuple, à conférer la légitimité à l’exercice des pouvoirs, et à consacrer l’alternance démocratique par la voie d’élections périodiques, libres et régulières.

Par conséquent, les membres issus des dix (10) nouvelles wilayas qui ont été élus sont concernés par l’opération du renouvellement dès lors que le mandat est suspendu à chaque renouvellement, nonobstant la période accomplie par un membre du Conseil de la Nation, qui est calculée comme mandat complet.

Par ces motifs :

La Cour constitutionnelle déclare ce qui suit :

Premièrement : En la forme : La saisine est recevable.

Deuxièmement : Au fond : Déclare l’absence de problème juridique dans l’application des articles 121 et 122 de la Constitution et, par conséquent, les membres du Conseil de la Nation représentant les dix (10) nouvelles wilayas sont concernés par le renouvellement par moitié afin d’assurer la continuité des institutions de l’Etat.

Troisièmement : Le présent avis est notifié au Président de la République, au Président du Conseil de la Nation, au Président de l’Assemblée Populaire Nationale, au Premier ministre et au délégué des auteurs de la saisine.

Quatrièmement : Le présent avis sera publié au Journal officiel de la République algérienne démocratique et populaire.

Ainsi en a-t-il été délibéré par la Cour constitutionnelle en sa séance du 6 Chaâbane 1446 correspondant au 5 février 2025.

Le Président de la Cour constitutionnelle

Omar BELHADJ

Leïla ASLAOUI, membre ;

Bahri SAADALLAH, membre ;

Mosbah MENAS, membre ;

Naceurdine SABER, membre ;

Ourdia NAIT KACI, membre ;

Abdelaziz BERGOUG, membre ;

Bouziane ALIANE, membre ;

Abdelhafid OSSOUKINE, membre ;

Ammar BOUDIAF, membre ;

Ahmed BENNINI, membre.

Avis n° 03/ A.C.C/I.C / 25 du 23 Dhou El Hidja 1446 correspondant au 19 juin 2025 relatif à l’interprétation des dispositions de l’article 116 de la Constitution.

La Cour constitutionnelle,

Sur saisine de la Cour constitutionnelle présentée par le député Abdelouahab Yakoubi, membre du groupe parlementaire du Mouvement de la Société pour la Paix, en sa qualité de mandataire des auteurs de la saisine, conformément aux dispositions des articles 192 (alinéa 2) et 193 (alinéa 2) de la Constitution, par une lettre enregistrée au greffe de la Cour constitutionnelle, en date du 4 juin 2025 sous le n° 03/2025, accompagnée de la liste des noms, prénoms, signatures et copies des cartes de député des auteurs de la saisine, aux fins d’interpréter l’article 116 de la Constitution ;

Vu la Constitution, notamment ses articles 116, 192 (alinéa 2), 193 (alinéa 2) et 196 ;

Vu la loi organique n° 12-04 du 18 Safar 1433 correspondant au 12 janvier 2012 relative aux partis politiques ;

Vu la loi organique n° 16-12 du 22 Dhou El Kaâda 1437 correspondant au 25 août 2016, modifiée et complétée, fixant l’organisation et le fonctionnement de l’Assemblée Populaire Nationale et du Conseil de la Nation ainsi que les relations fonctionnelles entre les chambres du Parlement et le Gouvernement ;

Vu l’ordonnance n° 21-01 du 26 Rajab 1442 correspondant au 10 mars 2021, modifiée et complétée, portant loi organique relative au régime électoral ;

Vu la loi organique n° 22-19 du 26 Dhou El Hidja 1443 correspondant au 25 juillet 2022 fixant les procédures et modalités de saisine et de renvoi devant la Cour constitutionnelle ;

Vu la loi n° 01-01 du 6 Dhou El Kaâda 1421 correspondant au 31 janvier 2001, modifiée, relative au membre du Parlement ;

Vu le règlement intérieur de l’Assemblée Populaire Nationale du 28 Rabie Ethani 1421 correspondant au 30 juillet 2000 fixant l’organisation de l’Assemblée Populaire Nationale ;

Vu l’avis n° 02/A.C.C/I.C/25 du 6 Chaâbane 1446 correspondant au 5 février 2025 relatif à l’interprétation des dispositions des articles 121 et 122 de la Constitution consacrant le principe res interpretata ;

Vu le règlement du 9 Safar 1444 correspondant au 5 septembre 2022 fixant les règles de fonctionnement de la Cour constitutionnelle, notamment ses articles 15 et 17 ;

Vu le règlement intérieur de la Cour constitutionnelle du 10 Safar 1444 correspondant au 6 septembre 2022, notamment ses articles 29 à 36 ;

Les membres rapporteurs entendus ;

Après en avoir délibéré ;

En la forme :

Attendu que la saisine de la Cour constitutionnelle aux fins d’interpréter l’article 116 de la Constitution, introduite par quarante-cinq (45) députés à l’Assemblée Populaire Nationale, au moyen d’une lettre déposée par le délégué des auteurs de la saisine auprès du greffe de la Cour constitutionnelle, accompagnée d’une liste comportant les noms, prénoms, signatures des dé putés auteurs de la saisine ainsi que des copies des cartes de député, est intervenue conformément aux articles 192 (alinéa 2) et 193 (alinéa 2) de la Constitution et, donc, recevable en la forme.

Au fond :

Attendu que l’article 116 de la Constitution, objet de la demande d’interprétation, prévoit que :

« L’opposition parlementaire jouit de droits lui permettant une participation effective aux travaux parlementaires et à la vie politique, notamment :

1)- la liberté d’opinion, d’expression et de réunion ;

2)- le bénéfice des aides financières accordées au prorata des élus au Parlement ;

3)- la participation effective aux travaux législatifs et au contrôle de l’action gouvernementale ;

4)- une représentation lui assurant une participation effective dans les organes des deux chambres du Parlement, notamment l’alternance à la présidence des commissions ;

5)- la saisine de la Cour constitutionnelle, conformément aux dispositions de l’alinéa 2 de l’article 193 de la Constitution ;

6)- la participation à la diplomatie parlementaire.

Chaque chambre du Parlement consacre une séance mensuelle pour débattre d’un ordre du jour présenté par un ou plusieurs groupes parlementaires de l’opposition.

Les modalités d’application de cet article sont précisées par le règlement intérieur de chacune des deux chambres du Parlement. » ;

Attendu que les auteurs de la saisine ont constaté que l’application de l’article 116 a entraîné des divergences dans la mise en œuvre entre les pratiques de la majorité parlementaire et ce que les députés de l’opposition perçoivent comme une entrave à leurs droits, en plus du nombre des griefs exposés dans des questions annexes jointes à la lettre de saisine ;

Attendu que la demande d’éclaircissement adressée à la Cour constitutionnelle concernant l’article 116 dépasse le cadre d’une demande d’interprétation vu que les auteurs de la saisine adressent à la Cour constitutionnelle des questions directes, auxquelles il ne relève pas de sa compétence d’y répondre ; bien que l’analyse de la lettre de saisine révèle une conception stéréotypée du désaccord naturel entre l’opposition et la majorité parlementaire qui, selon eux, a affaibli le contrôle parlementaire et a vidé l’article 116 de la Constitution de sa substance ;

Attendu que les auteurs de la saisine se sont écartés du texte de l’article 192 (alinéa 2), dans la présente demande, étant donné qu’elle comprend un grand nombre de questions relatives aux pratiques de la majorité telles que, à titre d’exemple, la désignation de l’instance compétente pour statuer sur le rejet, par le bureau de l’Assemblée, des demandes émanant de l’opposition, ou la possibilité de réviser la Constitution pour optimiser l’exercice de ses droits, ou encore sa marginalisation dans la représentation diplomatique parlementaire… ;

Attendu que l’article 116 comporte plusieurs axes relatifs aux différents droits dont jouit l’opposition parlementaire, et que la définition de leur contenu nécessite une interprétation de leur portée constitutionnelle à la lumière du contexte du travail parlementaire, sans déroger au texte constitutionnel, dans un processus intellectuel et logique visant à clarifier les mots du texte, à concilier ses différents éléments afin de le comprendre et d’en dégager la portée normative, avec toute l’autorité de la chose interprétée (res interpretata) d’une part et du caractère officiel d’autre part de par sa publication au Journal officiel. C’est, d’ailleurs, ce que la Cour constitutionnelle n’a eu de cesse de rappeler à chaque occasion, notamment dans son premier avis où elle a défini sa méthode affirmant son approche fondée sur la déduction de la volonté du constituant à travers la compréhension de la finalité qu’il a visée, tout en tenant compte des zones d’ambiguïté la caractérisant qu’il convient de dissiper afin de lever toute équivoque dans son interprétation, et ce, pour éviter toute contradiction susceptible d’altérer le contexte général de la Constitution ;

Attendu que la Cour constitutionnelle, en sa qualité de gardienne fidèle de la légalité  constitutionnelle et garante de l’équilibre institutionnel, a une compétence interprétative limitée et définie par ce qui lui a été demandé dans la lettre de saisine, qui consiste à éclaircir une disposition constitutionnelle obscure, lacunaire ou soulevant des divergences dans son application. Son intervention en matière d’interprétation s’effectue en se référant à la volonté constituante, telle qu’elle se dégage du sens des termes utilisés, en tenant compte des circonstances de leur  élaboration et des conséquences de leur mise en œuvre, sans jamais détacher le texte  constitutionnel de son contexte, mais en l’examinant dans le cadre historique dans lequel il est né ;

Attendu que cette compétence interprétative ne peut être exercée par la Cour constitutionnelle que si les auteurs de la saisine prouvent l’existence d’une ambiguïté, d’une lacune ou d’une contradiction entre les dispositions constitutionnelles, ou si le texte prête à plus d’un sens, et que ces dispositions ont donné lieu à un différend d’application entre institutions, ce qui nécessite une interprétation uniforme excluant, ainsi, de sa compétence interprétative, le contrôle de la constitutionnalité des pratiques de la majorité parlementaire, lesquelles relèvent d’une saisine de nature particulière relative aux différends entre les pouvoirs constitutionnels, conformément à l’article 192 (alinéa 2) ;

Attendu que le droit de saisir la Cour constitutionnelle, conformément aux dispositions de l’alinéa 2 de l’article 193 de la Constitution, ne constitue pas un droit accordé à l’opposition en sa qualité institutionnelle, mais un droit exercé par les députés ou les membres du Conseil de la Nation lorsque la condition numérique est remplie, même s’ils ne font pas partie de l’opposition. Il en découle que le constituant n’a pas institué un statut juridique indépendant pour l’opposition en matière d’initiative parlementaire, mais lui a permis d’exercer ce droit dans les limites de son intégration au sein de formations parlementaires organisées selon des règles numériques ;

Attendu que face à la demande d’interprétation de l’article 116 et en l’absence de définition de l’opposition parlementaire dans les chapitres de la Constitution, la Cour constitutionnelle a estimé nécessaire de clarifier ce concept, en tant que composante démocratique fondamentale des systèmes pluralistes reposant sur la reconnaissance du droit de l’opposition à la différence et à une représentation équitable entre les forces politiques.  C’est pourquoi la Cour constitutionnelle considère que l’intention du constituant, derrière la formulation de l’article 116, était de reconnaître à l’opposition plusieurs droits : des droits de contrôle par l’interpellation du Gouvernement, des droits de critique en proposant des alternatives aux politiques publiques, des droits législatifs en participant à la discussion des projets de loi, et même en proposant des projets de lois, ainsi que des droits de représentation en portant la voix d’une partie de l’opinion publique non représentée au sein de l’exécutif, y compris dans l’activité diplomatique du Parlement ;

Attendu qu’il convient de rappeler que l’opposition parlementaire est l’ensemble des députés et des membres du Conseil de la Nation qui ne sont pas affiliés à la majorité présidentielle ou  parlementaire, et qui expriment leur désaccord, partiel ou total, avec la politique menée par le Gouvernement. Au sens de l’article 116 de la Constitution, il s’agit de l’entité constituée par les partis ou les indépendants s’étant déclarés comme opposition positive ;

Ainsi, le constituant lui a reconnu un certain nombre de droits fondamentaux (liberté d’expression et de réunion), institutionnels (financement, participation aux commissions, saisine de la Cour constitutionnelle), et procéduraux (tels que la tenue mensuelle d’une séance consacrée à débattre d’un ordre du jour présenté par un ou plusieurs groupes parlementaires d’opposition). Ces droits, dans leur ensemble, font de l’opposition un acteur constitutionnel à part entière. De plus, l’utilisation par le constituant de l’adverbe « notamment » dans l’énumération des droits de l’opposition parlementaire vise à élargir l’interprétation et à ne pas se limiter exclusivement aux droits énoncés à l’article 116 ;

Attendu qu’après un examen approfondi du contenu de la demande d’interprétation, la Cour constitutionnelle a conclu que les formulations verbales qu’elle contient portent essentiellement sur les modalités d’application des dispositions de l’article 116 et non sur l’interprétation de l’article en soi. Cet article reconnaît à l’opposition un ensemble de droits relatifs à l’activité parlementaire, tout en renvoyant à l’autorité réglementaire de chaque chambre du Parlement le soin de définir les modalités de leur mise en œuvre ;

Il en résulte que seuls les membres du Parlement sont en mesure de clarifier et de préciser les modalités d’application de l’article 116, objet de la demande d’interprétation, et non la Cour constitutionnelle. Par conséquent, l’article 116 est clair, en tous ses alinéas, ce qui le rend immédiatement applicable de manière volontaire et contraignante, et ne soulève aucune ambiguïté ou contradiction. Les auteurs de la saisine n’ont, d’ailleurs, signalé aucun aspect indiquant une lacune, une ambiguïté, une contradiction ou une pluralité de significations possibles quant au sens de cet article. La lettre de saisine met, plutôt, en exergue des pratiques et non le texte constitutionnel en soi.

Par ces motifs :

La Cour constitutionnelle déclare ce qui suit :

Premièrement : En la forme :

La saisine est recevable.

Deuxièmement : Au fond

Déclare la clarté de l’article 116 de la Constitution dans tous ses alinéas.

Troisièmement : Le présent avis sera notifié au Président de la République, au Président du Conseil de la Nation, au Président de l’Assemblée Populaire Nationale, au Premier ministre et au délégué des auteurs de la saisine.

Quatrièmement : Le présent avis sera publié au Journal officiel de la République algérienne démocratique et populaire.

Ainsi en a-t-il été délibéré par la Cour constitutionnelle en sa séance tenue le 23 Dhou El Hidja 1446 correspondant au 19 juin 2025.

La Présidente de la Cour constitutionnelle par intérim

Leila ASLAOUI

— Bahri SAADALLAH, membre ;

— Mosbah MENAS, membre ;

— Naceurdine SABER, membre ;

— Abdelaziz BERGOUG, membre ;

— Abdelouahab KHERIEF, membre ;

— Bouziane ALIANE, membre ;

— Abdelhafid OSSOUKINE, membre ;

— Ammar BOUDIAF, membre ;

— Ahmed BENNINI, membre.

Communiqués de la Cour 2025

image_print

Communiqués de la Cour 2024

image_print

Le Président de la Cour constitutionnelle reçoit le Président de la Cour suprême de la République islamique de Mauritanie

image_print

Le Président de la Cour constitutionnelle, M. Omar Belhadj, a reçu, mercredi au siège de la Cour, le Président de la Cour suprême de la République islamique de Mauritanie, M. Cheikh Ahmed Ould Sid’Ahmed, qui lui a rendu une visite de courtoisie en compagnie d’une délégation.

Lors de cette rencontre à laquelle ont assisté les membres de la Cour constitutionnelle, les deux parties ont salué la profondeur des relations unissant les deux pays frères, Gouvernement et peuple, ainsi que le haut niveau de la coopération bilatérale.

Ils ont également passé en revue, à cette occasion, les moyens et perspectives de renforcer cette coopération dans divers domaines, notamment celui de la justice constitutionnelle.

Au terme de la rencontre, les deux parties ont réitéré leur volonté de redoubler d’efforts pour continuer à consolider les relations de coopération et d’échange de connaissances et d’expertises entre l’Algérie et la Mauritanie dans divers domaines, notamment en matière de justice constitutionnelle.

Vidéothèque

Espaces de la justice constitutionnelle

تـابعونا على الصفحة