Avis n° 03/A. C.C/I.C/24 du 22 Joumada El Oula 1446 correspondant au 24 novembre 2024 relatif à l’interprétation de la disposition contenue dans l’article 122 (alinéa in fine) de la Constitution.
La Cour constitutionnelle,
Sur saisine de la Cour constitutionnelle déposée par le Président du Conseil de la Nation, conformément aux dispositions des articles 192 (alinéa 2) et 193 (alinéa 1er) de la Constitution, par lettre datée du 11 novembre 2024 portant le n° 309/24 et enregistrée au greffe de la Cour constitutionnelle en date du 12 novembre 2024, sous le n° 03/24, en vue d’interpréter la disposition contenue dans l’article 122 (alinéa in fine) de la Constitution ;
Vu la Constitution, notamment en ses articles 114, 118, 121, 122, 185, 192 (alinéa 2), 193 (alinéa 1er), 194, 196, 197 (alinéa 1er) et 198 (alinéa in fine) ;
Vu la loi organique n° 16-12 du 22 Dhou El Kaâda 1437 correspondant au 25 août 2016, modifiée et complétée, fixant l’organisation et le fonctionnement de l’Assemblée Populaire Nationale et du Conseil de la Nation ainsi que les relations fonctionnelles entre les chambres du Parlement et le Gouvernement ;
Vu l’ordonnance n° 21-01 du 26 Rajab 1442 correspondant au 10 mars 2021, modifiée et complétée, portant loi organique relative au régime électoral ;
Vu la loi organique n° 22-19 du 26 Dhou El Hidja 1443 correspondant au 25 juillet 2022 fixant les procédures et modalités de saisine et de renvoi devant la Cour constitutionnelle, notamment son article 13 ;
Vu le règlement du 9 Safar 1444 correspondant au 5 septembre 2022 fixant les règles de fonctionnement de la Cour constitutionnelle, notamment ses articles 15 et 17 ;
Vu le règlement intérieur de la Cour constitutionnelle du 10 Safar 1444 correspondant au 6 septembre 2022, notamment ses articles 29, 31, 32, 33, 34, 35 et 36 ;
Le membre rapporteur entendu ;
Après en avoir délibéré,
En la forme :
Attendu que la saisine déposée par le Président du Conseil de la Nation en vue d’interpréter une disposition constitutionnelle est recevable en la forme, conformément aux dispositions des articles 192 (alinéa 2) et 193 (alinéa 1er) de la Constitution.
Au fond :
Attendu que le constituant a confirmé dans le préambule de la Constitution de 2020 que « La Constitution est au-dessus de tous, elle est la loi fondamentale qui garantit les droits et les libertés individuels et collectifs, protège le principe du libre choix du peuple, confère la légitimité à l’exercice des pouvoirs, et consacre l’alternance démocratique par la voie d’élections périodiques libres et régulières ».
Attendu que le constituant a ajouté : « Ce préambule fait partie intégrante de la présente Constitution ».
Attendu que l’esprit du texte constitutionnel consacre le principe de l’alternance démocratique, de ce fait, l’article 88 de la Constitution fixe le mandat du Président de la République, de même que l’article 122 (alinéa in fine) de la Constitution détermine le mandat du membre du Parlement.
Attendu que l’approche de la Cour constitutionnelle, en matière d’interprétation des dispositions de la Constitution, consiste à cerner l’intention du constituant lors de l’élaboration desdites dispositions ainsi que le contexte dans lequel elles ont été formulées.
Attendu que la Constitution de 2020 a été élaborée dans le contexte du Hirak populaire originel qui a débuté le 22 février 2019, lequel a revendiqué la moralisation de la vie politique ainsi que la consécration du principe de l’alternance au pouvoir à travers le renouvellement de la classe politique, en concrétisation de la démocratie représentative, ce qui a été réalisé à travers l’article 122 (alinéa in fine) de la Constitution susmentionné, qui fixe le nombre de mandats parlementaires à deux mandats consécutifs ou séparés. Cette disposition a effectivement été appliquée lors des élections législatives de 2021 ainsi que lors du renouvellement partiel et de l’élection des membres du Conseil de la Nation en 2022.
Sur ce, les dispositions de l’article 122 (alinéa in fine) de la Constitution sont claires et ne présentent aucune ambiguïté, confusion ou contradiction avec d’autres dispositions.
Attendu que la Constitution dans son article 122 (alinéa 3), limite le mandat du Conseil de la Nation à six (6) ans, et que nul ne peut exercer plus de deux mandats parlementaires, séparés dans le temps ou consécutifs.
Attendu que la Cour constitutionnelle souligne que les dispositions de l’article 122 de la Constitution s’appliquent aux membres actuels ainsi qu’aux anciens membres ayant exercé plus d’un mandat avant la promulgation de la Constitution actuelle.
Par conséquent, la Cour constitutionnelle émet l’avis suivant :
Premièrement : En la forme :
La saisine du Président du Conseil de la Nation est recevable.
Deuxièmement : Au fond :
On entend par l’expression « nul ne peut exercer plus de deux mandats parlementaires séparés ou consécutifs » contenue dans l’article 122 (alinéa in fine) de la Constitution, que nul ne peut se porter candidat à l’une des deux chambres du Parlement s’il a exercé deux mandats parlementaires, qu’ils soient consécutifs ou séparés, et que cette signification s’applique aussi bien au passé qu’au présent.
Troisièmement : Le présent avis est notifié au Président de la République, au Président du Conseil de la Nation, au Président de l’Assemblée Populaire Nationale et au Premier ministre.
Quatrièmement : Le présent avis sera publié au Journal officiel de la République algérienne démocratique et populaire.
Ainsi en a-t-il été délibéré par la Cour constitutionnelle en sa séance tenue le 22 Joumada El Oula 1446 correspondant au 24 novembre 2024.
Le Président de la Cour constitutionnelle
Omar BELHADJ
— Leïla Aslaoui, membre ;
— Bahri Saadallah, membre ;
— Mosbah Menas, membre ;
— Naceurdine Saber, membre ;
— Ameldine Boulanouar, membre ;
— Fatiha Benabbou, membre ;
— Abdelouahab Kherief, membre ;
— Abbas Ammar, membre ;
— Abdelhafid Ossoukine, membre ;
— Ammar Boudiaf, membre ;
— Mohamed Bouterfas, membre.