TITRE IV
DES PROCEDURES ET MODALITES DE SAISINE PAR RENVOI EN MATIERE D’EXCEPTION D’INCONSTITUTIONNALITE
Chapitre 1er
Dispositions générales
Art. 15. — L’exception d’inconstitutionnalité peut être soulevée par l’une des parties au procès, devant les juridictions relevant de l’ordre judiciaire ordinaire ou de l’ordre judiciaire administratif, conformément aux dispositions de l’article 195 (alinéa 1er) de la Constitution. L’exception d’inconstitutionnalité peut être soulevée pour la première fois en appel ou en cassation. Si l’exception d’inconstitutionnalité est soulevée au cours de l’instruction judiciaire, elle est examinée par la chambre d’accusation.
Art. 16. — L’exception d’inconstitutionnalité peut être soulevée devant le tribunal criminel de première instance et le tribunal criminel d’appel. L’exception d’inconstitutionnalité est examinée, avant l’ouverture des débats, par le tribunal criminel.
Art. 17. — L’exception d’inconstitutionnalité ne peut être soulevée d’office par le juge du siège et le magistrat du ministère public ou du commissariat d’Etat. Toutefois, les magistrats du ministère public ou du commissariat d’Etat peuvent, sur demande de la Cour constitutionnelle, faire des observations écrites, sur l’exception d’inconstitutionnalité. Art. 18. — Sous réserve des dispositions de la présente loi organique, sont appliquées les dispositions du code de procédure civile et administrative et du code de procédure pénale devant les juridictions auprès desquelles l’exception d’inconstitutionnalité est soulevée
Chapitre 2
Conditions et modalités d’exercice de l’exception d’inconstitutionnalité
Art. 19. — L’exception d’inconstitutionnalité est, à peine d’irrecevabilité, présentée dans un écrit distinct et motivé.
Art. 20. — La juridiction auprès de laquelle l’exception est soulevée, statue immédiatement, par décision motivée, après avis du ministère public ou du commissariat d’Etat, sur la transmission de l’exception d’inconstitutionnalité à la Cour suprême ou au Conseil d’Etat, selon le cas. Si la formation de la juridiction comprend des assesseurs non magistrats, elle statue hors leur présence.
Art. 21. — Il est procédé à la transmission de l’exception d’inconstitutionnalité, à la Cour suprême ou au Conseil d’Etat, selon le cas, si les conditions suivantes sont réunies :
— la disposition législative ou règlementaire contestée détermine l’issue du litige ou constitue le fondement des poursuites ;
— la disposition législative ou réglementaire contestée n’a pas déjà été déclarée conforme à la Constitution par le Conseil constitutionnel ou la Cour constitutionnelle, sauf changement de circonstances ;
— le moyen soulevé présente un caractère sérieux.
Art. 22. — Toute personne ayant intérêt, peut intervenir dans la procédure de l’exception d’inconstitutionnalité devant la juridiction concernée, par un écrit distinct et motivé conformément aux dispositions des articles 19 et 21 de la présente loi organique, préalablement à la décision de la juridiction sur la transmission de l’exception d’inconstitutionnalité. Si la demande est acceptée, la partie intervenante obéit aux mêmes procédures applicables aux parties.
Art. 23. — Dans les dix (10) jours de son prononcé, la décision de transmettre l’exception d’inconstitutionnalité est adressée, à la Cour suprême ou au Conseil d’Etat, selon le cas, accompagnée des mémoires et des conclusions des parties. Cette décision est notifiée aux parties et n’est susceptible d’aucun recours.
Art. 24. — La décision de refus de transmettre l’exception d’inconstitutionnalité est notifiée aux parties, par le greffe, dans un délai, maximum, de trois (3) jours de son prononcé. Elle ne peut être contestée qu’à l’occasion d’un recours contre la décision réglant tout ou partie du litige. La contestation doit être présentée dans un écrit distinct et motivé.
En cas de refus de transmettre l’exception d’inconstitutionnalité à la Cour suprême ou au Conseil d’Etat, selon le cas, la juridiction continue à statuer sur l’affaire.
Art. 25. — En cas de transmission de l’exception d’inconstitutionnalité, la juridiction saisie sursoit à statuer sur le litige, jusqu’à réception de la décision de la Cour suprême ou du Conseil d’Etat ou celle de la Cour constitutionnelle lorsque l’exception lui a été renvoyée.
Toutefois, le cours de l’instruction n’est pas suspendu et la juridiction peut prendre les mesures provisoires ou conservatoires nécessaires.
Art. 26. — La juridiction ne sursoit pas à statuer, lorsqu’une personne est privée de liberté à raison de l’instance ou lorsque l’instance a pour objet de mettre fin à une mesure privative de liberté, sauf opposition du concerné.
Elle ne sursoit pas à statuer, également, lorsque la loi prévoit qu’elle doit statuer dans un délai déterminé ou en urgence.
Si la juridiction de première instance statue sans attendre la décision relative à l’exception d’inconstitutionnalité et s’il est formé appel de sa décision, la juridiction d’appel sursoit à statuer, sauf dans les cas cités dans les alinéas précédents.
Art. 27. — Si un pourvoi en cassation a été introduit alors que les juges du fond se sont prononcés sans attendre la décision de la Cour suprême ou du Conseil d’Etat ou, celle de la Cour constitutionnelle lorsque l’exception lui a été renvoyée, il est sursis à toute décision sur le pourvoi tant qu’il n’a pas été statué sur l’exception d’inconstitutionnalité.
Toutefois, la Cour suprême ou le Conseil d’Etat, selon le cas, ne sursoit pas à statuer lorsque l’intéressé est privé de liberté à raison de l’instance ou lorsque l’instance a pour objet de mettre fin à une mesure privative de liberté, sauf opposition de l’intéressé, ou lorsque la loi prévoit qu’ils doivent statuer dans un délai déterminé ou en urgence.
Art. 28. — Lorsque l’instance a un caractère civil, elle est reprise conformément aux dispositions du code de procédure civile et administrative, dès la réception de la décision de la Cour constitutionnelle. La reprise de l’action publique intervient à l’initiative du ministère public.
Chapitre 3
Dispositions applicables devant la Cour suprême et le Conseil d’Etat.
Art. 29. — Le premier président de la Cour suprême ou le président du Conseil d’Etat, dès la réception de la décision de transmettre l’exception d’inconstitutionnalité prévue à l’article 23 de la présente loi organique, avise immédiatement le procureur général ou le commissaire d’Etat.
Le procureur général près la Cour suprême ou le commissaire d’Etat auprès du Conseil d’Etat, présente ses réquisitions dans un délai, maximum, de cinq (5) jours.
Les parties sont mises à même de présenter leurs observations écrites.
Art. 30. — Dans un délai de deux (2) mois, à compter de la réception de la décision de transmettre l’exception d’inconstitutionnalité prévue à l’article 23 de la présente loi organique, la Cour suprême ou le Conseil d’Etat, selon le cas, se prononce sur le renvoi de l’exception d’inconstitutionnalité à la Cour constitutionnelle. Il est procédé à ce renvoi, lorsque les conditions prévues à l’article 21 de la présente loi organique sont réunies.
Art. 31. — Lorsque l’exception d’inconstitutionnalité est soulevée directement devant la Cour suprême ou le Conseil d’Etat, la juridiction concernée doit se prononcer par priorité sur son renvoi devant la Cour constitutionnelle, dans le délai prévu à l’article 30 ci-dessus.
Art. 32. — L’arrêt de la Cour suprême ou du Conseil d’Etat, selon le cas, est rendu par une formation présidée par le président de chaque juridiction et, en cas d’empêchement, par le vice-président, et composée du président de la chambre concernée et de trois (3) conseillers désignés, selon le cas, par le premier président de la Cour suprême ou le président du Conseil d’Etat.
Art. 33. — La décision motivée de la Cour suprême ou du Conseil d’Etat, selon le cas, est transmise à la Cour constitutionnelle, accompagnée des conclusions et mémoires des parties.
Art. 34. — En cas de renvoi de l’exception d’inconstitutionnalité à la Cour constitutionnelle, la Cour suprême ou le Conseil d’Etat, selon le cas, doit surseoir à statuer jusqu’à ce que soit prononcée l’exception d’inconstitutionnalité, sauf lorsque l’intéressé est privé de liberté à raison de l’instance ou lorsque l’instance a pour objet de mettre fin à une mesure privative de liberté, sauf opposition de l’intéressé, ou lorsque la loi prévoit qu’ils doivent statuer dans un délai déterminé ou en urgence.
Art. 35. — La décision de la Cour suprême ou du Conseil d’Etat, selon le cas, est communiquée à la juridiction qui a transmis l’exception d’inconstitutionnalité qui la notifie aux parties, dans les dix (10) jours de son prononcé.
Art. 36. — Si la Cour suprême ou le Conseil d’Etat, selon le cas, ne s’est pas prononcé dans le délai prévu à l’article 30 ci-dessus, l’exception est renvoyée d’office à la Cour constitutionnelle. Le renvoi d’office est régi par les mêmes dispositions applicables au renvoi ordinaire, prévues dans la présente loi organique.
Art. 37. — En cas de refus par la Cour suprême ou le Conseil d’Etat, selon le cas, du renvoi à la Cour constitutionnelle de l’exception d’inconstitutionnalité, celle-ci reçoit une copie de sa décision motivée.
La Cour suprême ou le Conseil d’Etat, selon le cas, transmet la décision de refus de renvoi de l’exception d’inconstitutionnalité, à la juridiction devant laquelle cette dernière a été soulevée, qui à son tour la notifie, dans un délai n’excédant pas cinq (5) jours, aux parties à l’affaire, pour prendre les mesures juridiques appropriées.
Chapitre 4
Dispositions applicables devant la Cour constitutionnelle
Art. 38. — La Cour constitutionnelle, avise immédiatement le Président de la République, dès la réception de la décision de renvoi de l’exception d’inconstitutionnalité, de la Cour suprême ou du Conseil d’Etat, selon le cas, conformément aux dispositions de l’article 195 de la Constitution.
Elle avise, également, le président du Conseil de la Nation, le président de l’Assemblée Populaire Nationale et le Premier ministre ou le Chef du Gouvernement, selon le cas, de la décision de renvoi, accompagnée des requêtes et mémoires des parties qui peuvent émettre leurs observations à la Cour constitutionnelle concernant l’exception d’inconstitutionnalité qui lui est soumise.
Art. 39. — Toute personne ayant intérêt, peut intervenir dans la procédure de l’exception d’inconstitutionnalité devant la Cour constitutionnelle, par un écrit motivé conformément aux dispositions de l’article 21 de la présente loi organique, préalablement à la mise en délibéré de l’exception.
Si la demande est acceptée, la partie intervenante obéit aux mêmes procédures applicables aux parties
Art. 40. — Les audiences de la Cour constitutionnelle sont publiques, sauf dans les cas exceptionnels fixés dans le règlement fixant les règles de son fonctionnement.
Art. 41. — Le représentant du Gouvernement et les parties représentées par leurs avocats sont mis à même de présenter contradictoirement leurs observations, auprès de la Cour constitutionnelle.
Art. 42. — Lorsque la Cour constitutionnelle a été saisie de l’exception d’inconstitutionnalité, l’extinction, pour quelque cause que ce soit, de l’action à l’occasion de laquelle l’exception d’inconstitutionnalité a été soulevée est sans conséquence sur l’examen de l’exception.
Art. 43. — La Cour constitutionnelle statue sur l’exception d’inconstitutionnalité dans les délais et conformément aux modalités prévues à l’article 195 (alinéa 2) de la Constitution.
La décision de la Cour constitutionnelle est notifiée aux Président de la République, au président du Conseil de la Nation, au président de l’Assemblée Populaire Nationale et au Premier ministre ou le Chef du Gouvernement, selon le cas.
En outre, la décision de la Cour constitutionnelle est notifiée à la Cour suprême ou au Conseil d’Etat, selon le cas, pour informer la juridiction devant laquelle l’exception d’inconstitutionnalité a été soulevée.
La décision de la Cour constitutionnelle est publiée au Journal officiel de la République algérienne démocratique et populaire.